Ainsi,
il avait déclaré à l'occasion d'une intervention
sur la chaîne de télévision allemande ZDF: "Lorsque
l'on considère les risques d'une action militaire, pas simplement
les conséquences humanitaires pour les gens innocents mais
aussi la question d'une déstabilisation régionale et
des conséquences sur le long terme d'une coalition antiterroriste,
alors on se doit de procéder à un examen très
approfondi". Après avoir répété
qu'une guerre en Irak pouvait être évitée, il
avait également estimé que les inspecteurs de l'ONU
avaient besoin de plus de temps pour mener à bien leur mission.
La position franco-allemande ne fait pas l'unanimité au
sein de l'Union européenne
Les pays membres de l'Union européenne se sont très
tôt divisés à propos de la question du désarmement
de l'Irak. Le tandem franco-allemand a alors pris la tête de
ceux qui estiment que la guerre ne peut intervenir qu'en dernier recours
; se sont joint à eux :la Belgique, la Suède.D'autres
pays se sont joints à la position anglo-américaine prônant
un recours à la force contre Bagdad censée dissimuler
des armes de destruction massive et soutenir le terrorisme international
; l'Italie, le Portugal, l'Espagne, la Pologne, la Hongrie, la Roumanie....
Du
consensus
Ainsi, lors d'une conférence de presse à Barcelone le
3 février 2003, Romano Prodi, Président de la Commission,
exhortait les membres de l'UE à s'exprimer d'une seule voix
dans crise irakienne: "Si nous ne parlons pas d'une seule
voix, notre voix n'existera pas et personne ne nous écoutera".
R.
Prodi estimait alors que la division européenne favorise
l'existence d'un monde unipolaire et génère une
confusion concernant l'UE; l'UE et les USA doivent régler
leurs différends (sur l'Irak mais aussi à propos
de l'existence d'une cour criminelle internationale et de la
signature du Traité sur les émissions de gaz à
effets de serre de Kyoto) car la paix dans le monde dépend
aussi de leur entente. |
_______________________
"Si nous ne parlons pas d'une seule voix, notre voix n'existera
pas et personne ne nous écoutera"
R. Prodi,
03/02/03
__________________________ |
La Déclaration commune européenne :
Lors d'un Sommet extraordinaire le 17 février 2003, les pays
membres de l'UE adoptèrent un consensus de façade sur
un éventuel recours à la force contre l'Irak. En effet,
une déclaration commune approuvée à l'issue d'un
bref débat souligne: "La guerre n'est pas inévitable.
La force doit être utilisée seulement en dernier recours.
(...) C'est au régime irakien à mettre fin à
cette crise en se conformant aux demandes du Conseil de sécurité
de l'ONU". Néanmoins, cette déclaration commune
relevait: "Cependant, les inspections ne peuvent continuer
indéfiniment en l'absence d'une entière coopération
irakienne", mais les inspecteurs doivent avoir "le
temps et les ressources que le Conseil de sécurité"
estimera nécessaire pour qu'il puissent mener à bien
leur tâche; "La manière dont la situation en
Irak sera gérée aura un impact important sur le monde
dans les prochaines décennies". Mais, la déclaration
commune ajoutait: "Bagdad ne doit pas se faire d'illusions";
l'Allemagne ayant insisté pour que la phrase "le temps
est désormais compté" soit supprimé
de la déclaration.
_____________________
"La guerre n'est pas inévitable. La force doit être
utilisée seulement en dernier recours."
Déclaration
commune des 15 pays membres de l'UE, 17/02/03
________________________ |
Les pays membres de l'UE reconnurent à cette occasion
que la présence des forces américaines était
nécessaire à la coopération irakienne ;
néanmoins, la déclaration insiste sur le fait
que Le Conseil de sécurité de l'ONU doit rester
"le centre de l'ordre international". |
Le secrétaire général de l'ONU, Koffi Annan,
qui était présent lors de l'ouverture du Sommet extraordinaire;
a accueilli favorablement la déclaration du soutien des 15
au travail des inspecteurs. Le Président français devait
déclaré au terme de ce sommet extraordinaire: "La
mini-crise européenne a été surmontée".
à la crise.
Une semaine après le Sommet européen extraordinaire,
les ministres des affaires étrangères des 15 réunis
à Bruxelles (24 février 2003) ne parvinrent pas à
trouver un accord sur la nécessité d'une nouvelle résolution.
Ainsi, Jack Straw, le secrétaire au Foreign Office, avait déclaré
que les britanniques et les américains déposeraient
le lundi qui suivait à New York un texte prévoyant un
possible recours à la force contre l'Irak: "Parce que
nous voulons un consensus international (...) nous donnerons une bonne
période allant jusqu'à deux semaines, peut-être
un peu plus, avant de demander une décision".
Concernant
le délais de deux semaine, le ministre français
des Affaires étrangères, Dominique de Villepin,
avait alors répondu: "S'inscrire dans un délai
et un calendrier qui n'est pas celui de la communauté
internationale nous paraît une erreur, nous paraît
prématuré. (...) ce serait se placer clairement
dans le cadre d'une intervention militaire". Le ministre
allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer,
s'était également opposé à la position
américano-britannique et avait déclaré:
"Je pense qu'il faut maintenant améliorer les
inspections," il ne faut pas "tomber dans l'automatisme".
La Belgique et la Suède s'étaient jointes à
l'Allemagne et à la France dans leur opposition face
à l'adoption d'une seconde résolution. |
Javier Solana,
Haut représentant pour la PESC de l'UE:
"nous avons écchoué." 24/02/03 |
Javier
Solana, le porte-parole de la diplomatie européenne, avait
ainsi conclu cette rencontre des ministres des affaires étrangères
européens du 24 février 2003: "nous avons échoué".
.
G. W. Bush : "The game is over" - Réactions franco-allemandes
G. W. Bush,
Président des Etats-Unis
© Department of Defense |
Après
l'allocution du Président américain G. W. Bush
le 6 février 2003 dans laquelle il déclarait que
"La partie est terminée" avec le régime
de Bagdad et que les que les Etats-Unis "seraient favorables"
à une deuxième résolution sur l'Irak autorisant
un éventuel recours à la force, le gouvernement
allemand réagissait le jours suivant en déclarant
hostile à une seconde résolution sur l'Irak.
Par l'intermédiaire de son porte-parole, Hans-Hermann
Langguth, G. Schröder déclarait: "A ce stade,
le gouvernement allemand ne voit pas le besoin d'une deuxième
résolution". |
Cette position de l'Allemagne constituait un revirement par rapport
à celle qu'elle avait adopté au début 2003 (voir
conférence de presse du 14 janvier 2003 - début de cette
synthèse) L'Allemagne, qui s'est opposée à l'instar
de la France à une intervention militaire en Irak, estimait
alors qu'il fallait laisser le temps nécessaire aux inspecteurs
en désarmement de l'ONU pour effectuer leur mission.
Près
d'une semaine après l'allocution du Président
américain, le Chancelier allemand, s'exprimant devant
le Bundestag (13 février 2003), avait interprété
la résolution 1441 du Conseil de sécurité
de l'ONU sur le désarmement de l'Irak comme n'autorisant
pas "automatiquement" une intervention militaire
contre ce pays. G. Schröder: "L'Allemagne soutient
cette résolution et nous avons oeuvré activement
en faveur de son application. (...) Mais il est également
clair que cette résolution ne contient rien d'automatique
en ce qui concerne le recours à la force militaire."
|
_______________________
"Avec
la France, la Russie et d'autres partenaires le gouvernement
(allemand) fait tout son possible en faveur d'un règlement
pacifique. (...) Nous pouvons désarmer l'Irak sans (lui
faire la) guerre."
G. Schröder
au Bundestag, le 13/02/03
__________________________ |
Le Chancelier manifestait le souhait d'un règlement pacifique
de la crise irakienne, en soulignant sur ce point la convergence des
positions allemande, française et russe: "Nous (...)
faisons notre devoir envers la paix et envers le désarmement
pacifique de l'Irak (...)Avec la France, la Russie et d'autres
partenaires le gouvernement (allemand) fait tout son possible en faveur
d'un règlement pacifique. C'est possible, et nous nous battons
pour cela. (...) On ne peut se tromper en déployant
d'importants efforts en faveur de la paix (...). Cette opinion
est partagée par une majorité de membres du Conseil
de sécurité de l'ONU. (...) Nous pouvons désarmer
l'Irak sans (lui faire la) guerre".
L'importante mobilisation des citoyens européens
Le 15 février
2003, 500.000 manifestants à Berlin (l'une des plus importantes
manifestations de la deuxième guerre mondiale) exprimaient
leur opposition à la guerre. En revanche, à Paris,
la mobilisation était située entre 100.000 et 250.000
participants (ce chiffre est relativement faible par rapports aux
autres pays membre de l'Union; sur toute la France, on a néanmoins
compté au total un demi million de manifestants dans quelques
72 villes). La mobilisation française contrastait par exemple
avec celle de l'Italie (650.000 personnes à Rome), de l'Angleterre
(750.000 personnes à Londres) ou de l'Espagne (1,3 million
de participants à Barcelone).
L'opposition franco-allemande au sein de l'OTAN
Lors d'une réunion de l'OTAN le 12 février 2003, l'Allemagne
et la France rejoints par la Belgique s'opposèrent à
l'initiative de l'OTAN visant à préparer la défense
de la Turquie en cas d'attaques venues de l'Irak. Les trois pays
avaient opposé leur véto à ce sujet au motif
qu'une telle décision plaçait l'OTAN dans une "logique
de guerre". La procédure bloquée devait permettre
l'envoi en Turquie d'avions de surveillance et de batteries antimissile
ainsi que des unités spécialisées dans la guerre
bactériologique et chimique.
Lord G.
Robertson, Secrétaire général de l'OTAN,
le 16/01/03 © NATO Photo |
En réaction, la Turquie avait officiellement invoqué
l'article 4 du traité fondateur de l'OTAN, selon lequel,
les membres de l'Organisation se consulteront lorsque "selon
l'opinion de l'un ou l'autre de ses membres, il apparaîtra
que l'intégrité territoriale, l'indépendance
politique ou la sécurité de l'un ou l'autre des
parties est menacée"; c'est la première
fois que cet article est invoqué depuis 53 ans. Ainsi,
face à l'opposition franco-germano-belge, la Turquie
demandait l'ouverture d'urgence de ces consultations. |
L'interruption
de la procédure avait constitué un obstacle pour les
USA dans leurs préparatifs de guerre contre l'Irak; néanmoins,
16 autres pays membres de l'OTAN étaient demeurés
favorables à ce que la procédure continue.
Néanmoins, le 16 février 2003 tous les membres de
l'OTAN trouvèrent un compromis concernant une aide militaire
pour protéger la Turquie. Le Comité des plans de Défense
de l'OTAN avait néanmoins déclaré "continuer
de soutenir les efforts des Nations unies dans la recherche d'une
solution pacifique à la crise". Le secrétaire
général de l'OTAN, G. Robertson, qui avait critiqué
les pays hostiles à cette décision (un document officieux
révélait qu'il leur reprochait de vouloir "saccager"
l'OTAN), avait alors finalement déclaré: "La
solidarité de l'Alliance a prévalu. (...) Nous avons
été capables de surmonter collectivement cette impasse".
La Russie s'associe à la position de la France et de l'Allemagne
Lors d'une conférence de presse commune du Président
russe Vladimir Poutine le 10 février 2003, le président
de la république française, Jacques Chirac déclarait:
"La Russie, l'Allemagne et la France sont déterminées
à donner toutes leurs chances au désarmement de l'Irak
dans la paix". A l'occasion de cette conférence
de presse, J. Chirac avait donné lecture d'une déclaration
commune sur la crise irakienne rédigé par la France,
l'Allemagne et la Russie; les trois pays estimaient alors que "toutes
les possibilités" prévues par la résolution
1441 du Conseil de sécurité de l'ONU "n'ont
pas, à l'évidence, encore été explorées".
La France, l'Allemagne et la Russie se prononçaient en
faveur de la poursuite des inspections et d'un "renforcement
substantiel de leurs capacités humaines et techniques
par tous les moyens"; "...l'usage de la force
ne pourrait constituer qu'un ultime recours". |
_______________________
"La Russie, l'Allemagne et la France sont déterminées
à donner toutes leurs chances au désarmement de
l'Irak dans la paix."
J. Chirac,
Conférence de presse avec V. Poutine, 10/02/03
__________________________ |
Le Mémorandum
franco-germano-russe :
Les trois pays exprimèrent leur position commune sur l'Irak
dans un mémorandum qu'ils déposèrent au Conseil
de sécurité le lundi 24 février 2003.Il reprenait
les idées exposées ci-dessus.
La déclaration commune franco-germano-russe :
Le 5 mars 2003, les ministres des affaires étrangères
français, allemand et russe se retrouvaient à Paris
pour se concerter à propos de la crise irakienne. Au terme
d'un déjeuner de travail au Quai d'Orsay, Dominique de Villepin,
Joschka Fischer et Igor Ivanov, déclarèrent: "Nous
ne laisserons pas passer un projet de résolution qui autoriserait
le recours à la force. La Russie et la France, en tant que
membres permanents du Conseil de sécurité, prendront
toutes leurs responsabilités sur ce point. (...) Notre
objectif commun demeure le désarmement effectif et complet
de l'Irak, conformément à la résolution 1441.
Nous considérons que cet objectif peut être atteint
par la voie pacifique des inspections" (déclaration
commune lue par le Ministre des affaires étrangères
français).
Concernant l'usage de son droit de véto par la France au
Conseil de sécurité, D. de Villepin avait déclaré:
"Nous sommes totalement sur la même ligne que la Russie";
or, aussi bien le Président Poutine que son Ministre des
affaires étrangères, Igor Ivanov, avait déjà
déclaré dans le passé qu'ils n'hésiteraient
pas à en faire usage (déclaration I. Ivanov du 04/03/2003
à Londres exprimant que la Russie utiliserait "bien
sûr son droit de veto").
Le Ministre russe avait alors indiqué que la Chine "partage
l'approche" franco-germano-russe à propos de la
crise irakienne.
Par ailleurs, la déclaration commune des trois pays précisait
que: "Ces inspections ne peuvent se poursuivre indéfiniment.
(...) Nous souhaitons par conséquent que les inspections
puissent se dérouler à un rythme désormais
accéléré, dans la ligne des propositions avancées
dans le mémorandum déposé au Conseil de sécurité.
(...) Nous souhaitons préciser et hiérarchiser
les questions en suspens, programme par programme, établir,
en regard, des échéanciers détaillés.
(...) A partir de cette méthode, les inspecteurs pourront
proposer sans aucun délai un programme de travail accompagné
de rapports d'étape réguliers au Conseil de sécurité.
Ce programme pourra prévoir une clause de rendez-vous, pour
permettre au Conseil d'évaluer les résultats d'ensemble
de ce processus".
Concernant le régime irakien, la déclaration commune
formulait le souhait que l'application stricte de la résolution
1441 infléchisse "l'évolution du régime
irakien. (...) Notre conviction (...) est que, bien
évidemment, le régime irakien, le régime de
Saddam Hussein, se conformant à l'impératif de désarmement,
ne serait pas tout à fait le même. (...) C'est
une perspective qui pourrait infléchir l'évolution
du régime irakien. (
) Le désarmement
de l'Irak aura des conséquences sur la nature même
du régime irakien".
Le couple franco-allemand réaffirme sa "logique de paix"
La logique de paix franco-allemande s'oppose à une 2ème
résolution du Conseil de sécurité des Nations
unies. Ainsi, le 24 février 2003, lors d'une conférence
de presse la position commune franco-allemande concernant la crise
en Irak, G. Schröder rappelait: "Nous sommes, comme
la France, d'avis que l'on dispose de suffisamment de possibilités
pour soutenir les progrès des inspecteurs de l'ONU dans la
cadre de la résolution 1441. (...) Au moment présent,
c'est la position commune, une nouvelle résolution n'est
pas utile".
_____________________
"Nous
sommes, comme la France, d'avis que l'on dispose de suffisamment
de possibilités pour soutenir les progrès des
inspecteurs de l'ONU dans la cadre de la résolution 1441."
G. Schröder,
le 24/02/03
________________________ |
Au
terme d'une rencontre franco-allemande qui avait lieu le même
jour (24 février), le Président français,
Jacques Chirac, déclarait: "Il n'y a aucune raison
de changer notre logique, qui est une logique de paix, et de
basculer dans une logique de guerre" et que les deux
pays n'étaient "pas favorables à une nouvelle
résolution. (...) Nous n'en voyons pas l'utilité,
et donc nous n'y serons pas favorables"; il avait ajouté:
"La majorité du conseil de sécurité
n'est pas non plus favorable à une nouvelle résolution".
Pour sa part, le Chancelier Schröder avait indiqué:
|
"Nous
considérons tous les deux que le désarmement pacifique
de l'Irak est possible".
La France et l'Allemagne ne porte pas le même regard que les
Etats-Unis sur les mesures irakiennes concernant son désarmement
Après la décision irakienne de destruction des missiles
prohibés Al-Samoud 2, les Etats-Unis déclarèrent
le 1er mars 2003: "il s'agit de la tromperie que nous avions
prédite" (déclaration du porte-parole de
la Maison Blanche, Ari Fleischer). En revanche, pour le chef des
inspecteurs de l'ONU, le suédois Hans Blix, qui venait de
soumettre son rapport trimestriel sur le désarmement irakien
au Conseil de sécurité (période 1er déc.
2002 - 28 fév. 2003), il c'était un "élément
très important d'un vrai désarmement" (déclaration
orale). Au cours du dernier trimestre d'inspection, le rapport du
chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU notifiait que,
550 inspections avaient eu lieu sans préavis sur environ
350 sites.
Le
rapport du chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU,
qui avait été discuté au sein du Conseil
de sécurité quelques jours plus tard, soulignait
notamment: "Sur le plan du désarmement, les résultats
ont été jusqu'à présent très
modestes. (...) On comprend mal pourquoi l'Irak n'a pas
agi plus rapidement. Si certaines des mesures qui sont prises
actuellement avaient été amorcées plus
tôt, elles auraient peut-être déjà
produit des résultats". |
Le Chef
des inspecteurs en désarmement de l'Irak, Hans Blix et
D. de Villepin. © Ministère des Affaires Etrangères
/ F. de la Mure |
Le Ministre des
affaires étrangères français, Dominique de Villepin,
avait alors estimé que la destruction des missiles irakiens
"confirme que les inspections donnent des résultats".
Lors des débats au Conseil de Sécurité le jeudi
27 février 2003, deux texte concernant le désarmement
de l'Irak avaient été confrontés: d'une part
le projet de résolution anglo-américaine contenant un
ultimatum et d'autre part, le mémorandum franco-germano-russe
soutenu par la Chine et la Syrie, qui propose le renforcement des
inspections, l'usage de la force ne pouvant intervenir qu'en dernier
recours; aucun consensus n'a été trouvé
7 mars 2003 : dernière chance pour la position franco-allemande
devant le Conseil de sécurité
Les membres du Conseil de sécurité étaient réuni
pour débattre du rapport d'étape trimestriel du chef
des inspecteurs en désarmement, Hans Blix, communiqué
la semaine précédente. Le rapport affirmait que l'Irak
ne s'était pas encore totalement conformé aux obligations
contenues dans la Résolution 1441 et faisait état de
la coopération insuffisante de l'Irak concernant ses armes
biologiques et chimiques; il critiquait notamment le rythme de communication
des documents sur ces armes prohibées. Bien que mitigé,
ce rapport soulignait néanmoins qu'"après une
période de coopération quelque peu réticente,
une accélération des initiatives de l'Irak est intervenue
en janvier". Ainsi, lors de sa présentation devant
le C.S., le chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU avait
insisté sur le fait que le processus d'inspection prendrait
encore plusieurs mois.
Au terme de cette présentation, le Secrétaire d'Etat
américain, Colin Powell, avait alors estimé qu'il y
avait "non-coopération" de la part de l'Irak.
De même, l'Angleterre avait estimé que le rapport révélait
une "violation patente" de la résolution 1441
du Conseil de sécurité.
Le ministre
des affaires étrangères français, D. de
Villepin, lors d'une séance du Conseil de sécurité
de l'ONU © Ministère des Affaires étrangères.
Photo F. de La Mure
.
|
La
France, par la voix de son Ministre des affaires étrangères,
Dominique de Villepin avait préféré insister
sur les "progrès" du processus de désarmement
de l'Irak; le Ministre français avait par ailleurs déclaré
que "la France ne laisserait pas passer une résolution
autorisant le recours automatique à la force".
D. de Villepin avait ensuite fait une proposition en trois parties
pour permettre un renforcement du régime des inspections:
1.l'établissement par les inspecteurs d'"une
hiérarchie des tâches de désarmement";
2.la remise par leurs soins "toutes les trois semaines
d'un rapport d'étape"; 3.la fixation d'"une
échéance pour dresser le bilan de la mise en oeuvre
du programme de travail" (le délai de 120 jours
contenu dans la résolution 1284 pouvant éventuellement
être réduit). |
De même, le Ministre des affaires étrangères allemand,
Joschka Fischer, avait déclaré que son pays souhaitait
que le désarmement de l'Irak s'effectue par des moyens pacifiques:
"Bagdad aurait pu prendre plus tôt et avec plus de bonne
volonté certaines mesures prises récemment. Néanmoins,
la coopération s'est notablement améliorée ces
derniers jours. Ceci constitue une évolution positive qui rend
d'autant moins compréhensibles les raisons qui pousseraient
à un abandon des inspections. (...) Le désarmement
pacifique est possible et constitue une véritable alternative
à la guerre".
La perspective d'une action unilatérale américaine :
carte sur table
Dans une conférence de presse télévisée
du 7 mars 2003, le Président américain George W. Bush,
réitérait qu'il "...ne laisserai pas les Américains
à la merci du dictateur irakien et de ses armes (...) Si
nous devions y aller, ce serait pour une mission claire: le désarmement.
Cela signifie un changement de régime".
_____________________
"Il
est temps pour les gens de montrer leurs cartes et de faire
savoir à la population où ils se situent par rapport
à Saddam Hussein."
G. W. Bush,
le 07/03/03
________________________ |
Concernant
un éventuel recours à la force, le Président
américain ajoutait que son pays agirai contre le tyran
irakien, même s'il n'était pas soutenu par d'autres
nations: "Si nous devons utiliser la force, je pense
que beaucoup de nations seront avec nous". Concernant
le vote d'une 2ème résolution par le Conseil de
Sécurité, G. W. Bush avait alors déclaré:
"Il est temps pour les gens de montrer leurs cartes
et de faire savoir à la population où ils se situent
par rapport à Saddam Hussein". |
La France évoque son droit de veto au Conseil de Sécurité
Lors d'une intervention à la télévision française
le 10 mars 2003 (TF1 et France 2), le Président Chirac avait
déclaré que la France n'hésiterai pas à
user de son droit de véto pour bloquer l'adoption d'une seconde
résolution fixant un ultimatum à l'Irak: "Quelles
que soient les circonstances, la France votera "non" parce
qu'elle considère, ce soir, qu'il n'y a pas lieu de faire une
guerre pour atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé,
le désarmement de l'Irak"; néanmoins, il avait
aussi ajouté ultérieurement: "L'Irak est toujours
un pays dangereux".
J.
Chirac avait ainsi déclaré que la France n'hésiterait
pas à user de son droit de veto (le dernier usage du
veto français contre une proposition américaine
remonte à la crise de Suez en 1956). Concernant le projet
de résolution anglo-américain, il avait ajouté:
"Ma conviction, c'est que ce soir, cette résolution
comportant un ultimatum et donc donnant le feu vert international
à la guerre n'a pas une majorité de neuf voix".
Par ailleurs, J. Chirac avait précisé au cours
de cette interview, qu'en cas de conflit, la France ouvrirait
- "cela va de soi" - son espace aérien
aux avions militaires de la coalition anglo-américaine.
|
_______________________
"Quelles que soient les circonstances, la France
votera "non" parce qu'elle considère, ce soir,
qu'il n'y a pas lieu de faire une guerre pour atteindre l'objectif
que nous nous sommes fixé, le désarmement de l'Irak."
J. Chirac,
Intervention télévisée France2-TF1, 10/03/03
__________________________ |
Mais le Président français avait formulé le souhait
que les inspecteurs puissent continuer à accomplir leur mission
conformément à la résolution 1441 du C.S.
Il a également tenu à réaffirmer l'existence
des liens d'amitié qui unissent la France et les Etats-Unis.
Concernant la division des pays européens au sujet de la question
irakienne, J. Chirac a estimé que "l'Europe ne sera
pas du tout divisée dès que la crise sera terminée";
elle "trouvera, dans ses remords de ne pas avoir pu concevoir
une position unique, une force nouvelle".
Le même jour, G. Schröder s'exprimait sur l'Irak sur la
chaîne d'information française LCI; à cette occasion,
le chancelier allemand s'est vivement opposé au vote d'une
deuxième résolution qui, à son avis, aurait légitimé
la guerre: "L'Allemagne ne va pas donner son accord à
une telle résolution qui légitime la guerre".
_____________________
"Il
y a une chose qui est claire: l'Allemagne sera aux côtés
de la France."
G. Schröder,
le 10/03/03
________________________ |
G.
Schröder avait alors réaffirmé son approbation
de la proposition française concernant la réunion
du Conseil de sécurité au niveau des chefs d'Etats
pour se prononcer sur la nécessité d'une nouvelle
résolution sur l'Irak: "Si cette décision
était à prendre par les chefs d'Etat et de gouvernement,
cela serait une bonne chose. (...) Moi, je n'ai pas de
problème pour accepter cette proposition française". |
Concernant la décision au Conseil de sécurité,
il avait déclaré: "Il y a une chose qui est
claire: l'Allemagne sera aux côtés de la France".
G. Schröder réitérait la volonté de son
pays d'un désarmement pacifique de l'Irak: "Nous allons
arriver à leur donner le temps dont ils ont besoin (aux inspecteurs)
pour obtenir ce que tout le monde souhaite, le véritable désarmement,
ceci avec des moyens pacifiques".
Dans le même sens, G. Schröder déclarait devant
le Bundestag le 14 février 2003: "Nous devons avoir
le courage de nous battre pour la paix tant qu'il reste une infime
parcelle d'espoir qu'une guerre peut être évitée.
(...) Ensemble avec nos amis Français, avec la Russie et
la Chine, nous sommes plus que jamais convaincus que le désarmement
de l'Irak peut et doit être obtenu par des moyens pacifiques.
(...) Nous pouvons obtenir un désarmement conséquent
et vérifiable grâce à une prorogation des inspections.
(...) C'est pourquoi nous considérions et nous considérons
encore qu'il faut insister sur la logique de paix plutôt que
de passer à une logique de guerre".
Par ailleurs, G. Schröder soulignait que les dernières
inspections avait démontré que Bagdad coopérait
"mieux et plus activement". L'assemblée avait
alors chaudement applaudi l'intervention du Chancelier allemand.
Préserver les relations de la France et de l'Allemagne avec
les Etats-Unis
Lors d'une conférence de presse le 25 février2003, organisée
après une rencontre avec le Premier ministre britannique, Tony
Blair, le Ministre des affaires étrangères allemand,
Joschka Fisher, déclarait à propos des relations germano-américaines:
"Nous sommes des alliés proches. En ce moment les choses
sont difficiles mais pas terribles, croyez-moi. (...) Pour
notre gouvernement, la relation transatlantique est un pilier de la
paix et de la stabilité, non seulement en Europe mais aussi
dans le monde". Joschka Fisher avait également estimé
que si l'Allemagne et le Royaume Uni n'étaient pas d'accord
sur la question irakienne, les relations entre les deux pays restaient
néanmoins "excellentes".
De son côté, lors d'une conférence de presse
télévisée le 7 mars 2003, le Président
américain déclarait à propos de relations
de son pays avec la France et l'Allemagne: "nous avons
un désaccord (...) Ils sont toujours nos amis".
Dans une interview à la télévision française
le 10 mars 2003, le Président français précisait
qu'en cas de conflit, la France ouvrirait - "cela va de
soi" - son espace aérien aux avions militaires de
la coalition anglo-américaine. . |
Rencontre
des ministres des affaires étrangères anglais,
américain et français: J. Straw, C. Powell et
D. de Villepin le 20 janvier 2003dans la résidence de
l'ambassadeur français à l'ONU © Ministère
des Affaires Etrangères / F. de la Mure |
. |