FRANCE ALLEMAGNE USA - IRAK 2003/1_2
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FRANCE ALLEMAGNE USA - IRAK 2003/1_2
• Dossier : le tandem franco-allemand et- la crise en Irak/1_2









S Y N T H E S E

LE TANDEM FRANCO-ALLEMAND FACE AU CONFLIT EN IRAK


- Fondement de la position franco-allemandesur l'Irak
- Evolution du face à face France-Allemagne /Etats-Unis
- Le développement du conflit au mois d'avril 2003
- Carte de l'Irak




Evolution du face à face entre le tandem franco-allemand et les Etats-Unis sur le désarmement irakien


Réactions de la France et de l'Allemagne face aux preuves américaines contre l'Irak

Au cours de la première réunion ministérielle du Conseil de sécurité sous présidence allemande le 5 février 2003 (l'Allemagne a accédé à la présidence tournante du CS le 1er février 2003), Collin Powell a présenté les preuves détenues par les Etats-Unis concernant la détention par Bagdad d'armes de destruction massive; or, la résolution 1441 de l'Onu du 8 novembre 2002 menaçait dans ce cas l'Irak de "sérieuses conséquences".

Peu avant l'exposé des preuves américaines sur l'Irak, le Ministre des affaires étrangères allemand avait réitéré l'opposition de son pays face à une intervention militaire en Irak.

Ainsi, il avait déclaré à l'occasion d'une intervention sur la chaîne de télévision allemande ZDF: "Lorsque l'on considère les risques d'une action militaire, pas simplement les conséquences humanitaires pour les gens innocents mais aussi la question d'une déstabilisation régionale et des conséquences sur le long terme d'une coalition antiterroriste, alors on se doit de procéder à un examen très approfondi". Après avoir répété qu'une guerre en Irak pouvait être évitée, il avait également estimé que les inspecteurs de l'ONU avaient besoin de plus de temps pour mener à bien leur mission.

La position franco-allemande ne fait pas l'unanimité au sein de l'Union européenne

Les pays membres de l'Union européenne se sont très tôt divisés à propos de la question du désarmement de l'Irak. Le tandem franco-allemand a alors pris la tête de ceux qui estiment que la guerre ne peut intervenir qu'en dernier recours; se sont joint à eux :la Belgique, la Suède.D'autres pays se sont joints à la position anglo-américaine prônant un recours à la force contre Bagdad censée dissimuler des armes de destruction massive et soutenir le terrorisme international ; l'Italie, le Portugal, l'Espagne, la Pologne, la Hongrie, la Roumanie....

Du consensus…
Ainsi, lors d'une conférence de presse à Barcelone le 3 février 2003, Romano Prodi, Président de la Commission, exhortait les membres de l'UE à s'exprimer d'une seule voix dans crise irakienne: "Si nous ne parlons pas d'une seule voix, notre voix n'existera pas et personne ne nous écoutera".

Romano Prodi estimait alors que la division européenne favorise l'existence d'un monde unipolaire et génère une confusion concernant l'UE; l'UE et les USA doivent régler leurs différends (sur l'Irak mais aussi à propos de l'existence d'une cour criminelle internationale et de la signature du Traité sur les émissions de gaz à effets de serre de Kyoto) car la paix dans le monde dépend aussi de leur entente.

La Déclaration commune européenne :

Lors d'un Sommet extraordinaire le 17 février 2003, les pays membres de l'UE adoptèrent un consensus de façade sur un éventuel recours à la force contre l'Irak. En effet, une déclaration commune approuvée à l'issue d'un bref débat souligne: "La guerre n'est pas inévitable. La force doit être utilisée seulement en dernier recours. (...) C'est au régime irakien à mettre fin à cette crise en se conformant aux demandes du Conseil de sécurité de l'ONU". Néanmoins, cette déclaration commune relevait: "Cependant, les inspections ne peuvent continuer indéfiniment en l'absence d'une entière coopération irakienne", mais les inspecteurs doivent avoir "le temps et les ressources que le Conseil de sécurité" estimera nécessaire pour qu'il puissent mener à bien leur tâche; "La manière dont la situation en Irak sera gérée aura un impact important sur le monde dans les prochaines décennies". Mais, la déclaration commune ajoutait: "Bagdad ne doit pas se faire d'illusions"; l'Allemagne ayant insisté pour que la phrase "le temps est désormais compté" soit supprimé de la déclaration.

Les pays membres de l'UE reconnurent à cette occasion que la présence des forces américaines était nécessaire à la coopération irakienne; néanmoins, la déclaration insiste sur le fait que Le Conseil de sécurité de l'ONU doit rester "le centre de l'ordre international".

Le secrétaire général de l'ONU, Koffi Annan, qui était présent lors de l'ouverture du Sommet extraordinaire; a accueilli favorablement la déclaration du soutien des 15 au travail des inspecteurs. Le Président français devait déclaré au terme de ce sommet extraordinaire: "La mini-crise européenne a été surmontée".

… à la crise.
Une semaine après le Sommet européen extraordinaire, les ministres des affaires étrangères des 15 réunis à Bruxelles (24 février 2003) ne parvinrent pas à trouver un accord sur la nécessité d'une nouvelle résolution. Ainsi, Jack Straw, le secrétaire au Foreign Office, avait déclaré que les britanniques et les américains déposeraient le lundi qui suivait à New York un texte prévoyant un possible recours à la force contre l'Irak: "Parce que nous voulons un consensus international (...) nous donnerons une bonne période allant jusqu'à deux semaines, peut-être un peu plus, avant de demander une décision".

Javier Solana, Haut représentant pour la PESC de l'UE: "nous avons écchoué." 24/02/03
Concernant le délais de deux semaine, le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, avait alors répondu: "S'inscrire dans un délai et un calendrier qui n'est pas celui de la communauté internationale nous paraît une erreur, nous paraît prématuré. (...) ce serait se placer clairement dans le cadre d'une intervention militaire". Le ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer, s'était également opposé à la position américano-britannique et avait déclaré: "Je pense qu'il faut maintenant améliorer les inspections," il ne faut pas "tomber dans l'automatisme". La Belgique et la Suède s'étaient jointes à l'Allemagne et à la France dans leur opposition face à l'adoption d'une seconde résolution.

Javier Solana, le porte-parole de la diplomatie européenne, avait ainsi conclu cette rencontre des ministres des affaires étrangères européens du 24 février 2003: "nous avons échoué".


G. W. Bush : "The game is over" - Réactions franco-allemandes

G. W. Bush, Président des Etats-Unis - © Department of Defense
Après l'allocution du Président américain G. W. Bush le 6 février 2003 dans laquelle il déclarait que "La partie est terminée" avec le régime de Bagdad et que les que les Etats-Unis "seraient favorables" à une deuxième résolution sur l'Irak autorisant un éventuel recours à la force, le gouvernement allemand réagissait le jours suivant en déclarant hostile à une seconde résolution sur l'Irak.

Par l'intermédiaire de son porte-parole, Hans-Hermann Langguth, G. Schröder déclarait: "A ce stade, le gouvernement allemand ne voit pas le besoin d'une deuxième résolution".

Cette position de l'Allemagne constituait un revirement par rapport à celle qu'elle avait adopté au début 2003 (voir conférence de presse du 14 janvier 2003 - début de cette synthèse) L'Allemagne, qui s'est opposée à l'instar de la France à une intervention militaire en Irak, estimait alors qu'il fallait laisser le temps nécessaire aux inspecteurs en désarmement de l'ONU pour effectuer leur mission.

Près d'une semaine après l'allocution du Président américain, le Chancelier allemand, s'exprimant devant le Bundestag (13 février 2003), avait interprété la résolution 1441 du Conseil de sécurité de l'ONU sur le désarmement de l'Irak comme n'autorisant pas "automatiquement" une intervention militaire contre ce pays. G. Schröder: "L'Allemagne soutient cette résolution et nous avons oeuvré activement en faveur de son application. (...) Mais il est également clair que cette résolution ne contient rien d'automatique en ce qui concerne le recours à la force militaire."

Le Chancelier manifestait le souhait d'un règlement pacifique de la crise irakienne, en soulignant sur ce point la convergence des positions allemande, française et russe: "Nous (...) faisons notre devoir envers la paix et envers le désarmement pacifique de l'Irak (...)Avec la France, la Russie et d'autres partenaires le gouvernement (allemand) fait tout son possible en faveur d'un règlement pacifique. C'est possible, et nous nous battons pour cela. (...) On ne peut se tromper en déployant d'importants efforts en faveur de la paix (...). Cette opinion est partagée par une majorité de membres du Conseil de sécurité de l'ONU. (...) Nous pouvons désarmer l'Irak sans (lui faire la) guerre".


L'importante mobilisation des citoyens européens

Le 15 février 2003, 500.000 manifestants à Berlin (l'une des plus importantes manifestations de la deuxième guerre mondiale) exprimaient leur opposition à la guerre. En revanche, à Paris, la mobilisation était située entre 100.000 et 250.000 participants (ce chiffre est relativement faible par rapports aux autres pays membre de l'Union; sur toute la France, on a néanmoins compté au total un demi million de manifestants dans quelques 72 villes). La mobilisation française contrastait par exemple avec celle de l'Italie (650.000 personnes à Rome), de l'Angleterre (750.000 personnes à Londres) ou de l'Espagne (1,3 million de participants à Barcelone).


L'opposition franco-allemande au sein de l'OTAN

Lors d'une réunion de l'OTAN le 12 février 2003, l'Allemagne et la France rejoints par la Belgique s'opposèrent à l'initiative de l'OTAN visant à préparer la défense de la Turquie en cas d'attaques venues de l'Irak. Les trois pays avaient opposé leur véto à ce sujet au motif qu'une telle décision plaçait l'OTAN dans une "logique de guerre". La procédure bloquée devait permettre l'envoi en Turquie d'avions de surveillance et de batteries antimissile ainsi que des unités spécialisées dans la guerre bactériologique et chimique.

Lord G. Robertson, Secrétaire général de l'OTAN, le 16/01/03 - © NATO Photo
En réaction, la Turquie avait officiellement invoqué l'article 4 du traité fondateur de l'OTAN, selon lequel, les membres de l'Organisation se consulteront lorsque "selon l'opinion de l'un ou l'autre de ses membres, il apparaîtra que l'intégrité territoriale, l'indépendance politique ou la sécurité de l'un ou l'autre des parties est menacée"; c'est la première fois que cet article est invoqué depuis 53 ans. Ainsi, face à l'opposition franco-germano-belge, la Turquie demandait l'ouverture d'urgence de ces consultations.

L'interruption de la procédure avait constitué un obstacle pour les USA dans leurs préparatifs de guerre contre l'Irak; néanmoins, 16 autres pays membres de l'OTAN étaient demeurés favorables à ce que la procédure continue.

Néanmoins, le 16 février 2003 tous les membres de l'OTAN trouvèrent un compromis concernant une aide militaire pour protéger la Turquie. Le Comité des plans de Défense de l'OTAN avait néanmoins déclaré "continuer de soutenir les efforts des Nations unies dans la recherche d'une solution pacifique à la crise". Le secrétaire général de l'OTAN, G. Robertson, qui avait critiqué les pays hostiles à cette décision (un document officieux révélait qu'il leur reprochait de vouloir "saccager" l'OTAN), avait alors finalement déclaré: "La solidarité de l'Alliance a prévalu. (...) Nous avons été capables de surmonter collectivement cette impasse".


La Russie s'associe à la position de la France et de l'Allemagne

Lors d'une conférence de presse commune du Président russe Vladimir Poutine le 10 février 2003, le président de la république française, Jacques Chirac déclarait: "La Russie, l'Allemagne et la France sont déterminées à donner toutes leurs chances au désarmement de l'Irak dans la paix". A l'occasion de cette conférence de presse, J. Chirac avait donné lecture d'une déclaration commune sur la crise irakienne rédigé par la France, l'Allemagne et la Russie;
les trois pays estimaient alors que "toutes les possibilités" prévues par la résolution 1441 du Conseil de sécurité de l'ONU "n'ont pas, à l'évidence, encore été explorées".

La France, l'Allemagne et la Russie se prononçaient en faveur de la poursuite des inspections et d'un "renforcement substantiel de leurs capacités humaines et techniques par tous les moyens"; "...l'usage de la force ne pourrait constituer qu'un ultime recours".

Le Mémorandum franco-germano-russe :

Les trois pays exprimèrent leur position commune sur l'Irak dans un mémorandum qu'ils déposèrent au Conseil de sécurité le lundi 24 février 2003.Il reprenait les idées exposées ci-dessus.

La déclaration commune franco-germano-russe :

Le 5 mars 2003, les ministres des affaires étrangères français, allemand et russe se retrouvaient à Paris pour se concerter à propos de la crise irakienne. Au terme d'un déjeuner de travail au Quai d'Orsay, Dominique de Villepin, Joschka Fischer et Igor Ivanov, déclarèrent: "Nous ne laisserons pas passer un projet de résolution qui autoriserait le recours à la force. La Russie et la France, en tant que membres permanents du Conseil de sécurité, prendront toutes leurs responsabilités sur ce point. (...) Notre objectif commun demeure le désarmement effectif et complet de l'Irak, conformément à la résolution 1441. Nous considérons que cet objectif peut être atteint par la voie pacifique des inspections" (déclaration commune lue par le Ministre des affaires étrangères français).

Concernant l'usage de son droit de véto par la France au Conseil de sécurité, D. de Villepin avait déclaré: "Nous sommes totalement sur la même ligne que la Russie"; or, aussi bien le Président Poutine que son Ministre des affaires étrangères, Igor Ivanov, avait déjà déclaré dans le passé qu'ils n'hésiteraient pas à en faire usage (déclaration I. Ivanov du 04/03/2003 à Londres exprimant que la Russie utiliserait "bien sûr son droit de veto").

Le Ministre russe avait alors indiqué que la Chine "partage l'approche" franco-germano-russe à propos de la crise irakienne.

Par ailleurs, la déclaration commune des trois pays précisait que: "Ces inspections ne peuvent se poursuivre indéfiniment. (...) Nous souhaitons par conséquent que les inspections puissent se dérouler à un rythme désormais accéléré, dans la ligne des propositions avancées dans le mémorandum déposé au Conseil de sécurité. (...) Nous souhaitons préciser et hiérarchiser les questions en suspens, programme par programme, établir, en regard, des échéanciers détaillés. (...) A partir de cette méthode, les inspecteurs pourront proposer sans aucun délai un programme de travail accompagné de rapports d'étape réguliers au Conseil de sécurité. Ce programme pourra prévoir une clause de rendez-vous, pour permettre au Conseil d'évaluer les résultats d'ensemble de ce processus".

Concernant le régime irakien, la déclaration commune formulait le souhait que l'application stricte de la résolution 1441 infléchisse "l'évolution du régime irakien. (...) Notre conviction (...) est que, bien évidemment, le régime irakien, le régime de Saddam Hussein, se conformant à l'impératif de désarmement, ne serait pas tout à fait le même. (...) C'est une perspective qui pourrait infléchir l'évolution du régime irakien. (…) Le désarmement de l'Irak aura des conséquences sur la nature même du régime irakien".


Le couple franco-allemand réaffirme sa "logique de paix"

La logique de paix franco-allemande s'oppose à une 2ème résolution du Conseil de sécurité des Nations unies. Ainsi, le 24 février 2003, lors d'une conférence de presse la position commune franco-allemande concernant la crise en Irak, G. Schröder rappelait: "Nous sommes, comme la France, d'avis que l'on dispose de suffisamment de possibilités pour soutenir les progrès des inspecteurs de l'ONU dans la cadre de la résolution 1441. (...) Au moment présent, c'est la position commune, une nouvelle résolution n'est pas utile".

Au terme d'une rencontre franco-allemande qui avait lieu le même jour (24 février), le Président français, Jacques Chirac, déclarait: "Il n'y a aucune raison de changer notre logique, qui est une logique de paix, et de basculer dans une logique de guerre" et que les deux pays n'étaient "pas favorables à une nouvelle résolution. (...) Nous n'en voyons pas l'utilité, et donc nous n'y serons pas favorables"; il avait ajouté: "La majorité du conseil de sécurité n'est pas non plus favorable à une nouvelle résolution". Pour sa part, le Chancelier Schröder avait indiqué: "Nous considérons tous les deux que le désarmement pacifique de l'Irak est possible".


La France et l'Allemagne ne porte pas le même regard que les Etats-Unis sur les mesures irakiennes concernant son désarmement

Après la décision irakienne de destruction des missiles prohibés Al-Samoud 2, les Etats-Unis déclarèrent le 1er mars 2003: "il s'agit de la tromperie que nous avions prédite" (déclaration du porte-parole de la Maison Blanche, Ari Fleischer). En revanche, pour le chef des inspecteurs de l'ONU, le suédois Hans Blix, qui venait de soumettre son rapport trimestriel sur le désarmement irakien au Conseil de sécurité (période 1er déc. 2002 - 28 fév. 2003), il c'était un "élément très important d'un vrai désarmement" (déclaration orale). Au cours du dernier trimestre d'inspection, le rapport du chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU notifiait que, 550 inspections avaient eu lieu sans préavis sur environ 350 sites.

Le Chef des inspecteurs en désarmement de l'Irak, Hans Blix et D. de Villepin. - © Ministère des Affaires Etrangères / F. de la Mure
Le rapport du chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU, qui avait été discuté au sein du Conseil de sécurité quelques jours plus tard, soulignait notamment: "Sur le plan du désarmement, les résultats ont été jusqu'à présent très modestes. (...) On comprend mal pourquoi l'Irak n'a pas agi plus rapidement. Si certaines des mesures qui sont prises actuellement avaient été amorcées plus tôt, elles auraient peut-être déjà produit des résultats".

Le Ministre des affaires étrangères français, Dominique de Villepin, avait alors estimé que la destruction des missiles irakiens "confirme que les inspections donnent des résultats".

Lors des débats au Conseil de Sécurité le jeudi 27 février 2003, deux texte concernant le désarmement de l'Irak avaient été confrontés: d'une part le projet de résolution anglo-américaine contenant un ultimatum et d'autre part, le mémorandum franco-germano-russe soutenu par la Chine et la Syrie, qui propose le renforcement des inspections, l'usage de la force ne pouvant intervenir qu'en dernier recours; aucun consensus n'a été trouvé


7 mars 2003 : dernière chance pour la position franco-allemande devant le Conseil de sécurité

Les membres du Conseil de sécurité étaient réuni pour débattre du rapport d'étape trimestriel du chef des inspecteurs en désarmement, Hans Blix, communiqué la semaine précédente. Le rapport affirmait que l'Irak ne s'était pas encore totalement conformé aux obligations contenues dans la Résolution 1441 et faisait état de la coopération insuffisante de l'Irak concernant ses armes biologiques et chimiques; il critiquait notamment le rythme de communication des documents sur ces armes prohibées. Bien que mitigé, ce rapport soulignait néanmoins qu'"après une période de coopération quelque peu réticente, une accélération des initiatives de l'Irak est intervenue en janvier". Ainsi, lors de sa présentation devant le C.S., le chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU avait insisté sur le fait que le processus d'inspection prendrait encore plusieurs mois.

Au terme de cette présentation, le Secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, avait alors estimé qu'il y avait "non-coopération" de la part de l'Irak. De même, l'Angleterre avait estimé que le rapport révélait une "violation patente" de la résolution 1441 du Conseil de sécurité.

Le ministre des affaires étrangères français, D. de Villepin, lors d'une séance du Conseil de sécurité de l'ONU - © Ministère des Affaires étrangères. Photo F. de La Mure
La France, par la voix de son Ministre des affaires étrangères, Dominique de Villepin avait préféré insister sur les "progrès" du processus de désarmement de l'Irak; le Ministre français avait par ailleurs déclaré que "la France ne laisserait pas passer une résolution autorisant le recours automatique à la force". D. de Villepin avait ensuite fait une proposition en trois parties pour permettre un renforcement du régime des inspections: 1.l'établissement par les inspecteurs d'"une hiérarchie des tâches de désarmement"; 2.la remise par leurs soins "toutes les trois semaines d'un rapport d'étape"; 3.la fixation d'"une échéance pour dresser le bilan de la mise en oeuvre du programme de travail" (le délai de 120 jours contenu dans la résolution 1284 pouvant éventuellement être réduit).

De même, le Ministre des affaires étrangères allemand, Joschka Fischer, avait déclaré que son pays souhaitait que le désarmement de l'Irak s'effectue par des moyens pacifiques: "Bagdad aurait pu prendre plus tôt et avec plus de bonne volonté certaines mesures prises récemment. Néanmoins, la coopération s'est notablement améliorée ces derniers jours. Ceci constitue une évolution positive qui rend d'autant moins compréhensibles les raisons qui pousseraient à un abandon des inspections. (...) Le désarmement pacifique est possible et constitue une véritable alternative à la guerre".


La perspective d'une action unilatérale américaine : carte sur table

Dans une conférence de presse télévisée du 7 mars 2003, le Président américain George W. Bush, réitérait qu'il "...ne laisserai pas les Américains à la merci du dictateur irakien et de ses armes (...) Si nous devions y aller, ce serait pour une mission claire: le désarmement. Cela signifie un changement de régime".

Concernant un éventuel recours à la force, le Président américain ajoutait que son pays agirai contre le tyran irakien, même s'il n'était pas soutenu par d'autres nations: "Si nous devons utiliser la force, je pense que beaucoup de nations seront avec nous". Concernant le vote d'une 2ème résolution par le Conseil de Sécurité, G. W. Bush avait alors déclaré: "Il est temps pour les gens de montrer leurs cartes et de faire savoir à la population où ils se situent par rapport à Saddam Hussein".


La France évoque son droit de veto au Conseil de Sécurité

Lors d'une intervention à la télévision française le 10 mars 2003 (TF1 et France 2), le Président Chirac avait déclaré que la France n'hésiterai pas à user de son droit de véto pour bloquer l'adoption d'une seconde résolution fixant un ultimatum à l'Irak: "Quelles que soient les circonstances, la France votera "non" parce qu'elle considère, ce soir, qu'il n'y a pas lieu de faire une guerre pour atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé, le désarmement de l'Irak"; néanmoins, il avait aussi ajouté ultérieurement: "L'Irak est toujours un pays dangereux".

Jacques Chirac avait ainsi déclaré que la France n'hésiterait pas à user de son droit de veto (le dernier usage du veto français contre une proposition américaine remonte à la crise de Suez en 1956). Concernant le projet de résolution anglo-américain, il avait ajouté: "Ma conviction, c'est que ce soir, cette résolution comportant un ultimatum et donc donnant le feu vert international à la guerre n'a pas une majorité de neuf voix".

Par ailleurs, J. Chirac avait précisé au cours de cette interview, qu'en cas de conflit, la France ouvrirait -"cela va de soi" - son espace aérien aux avions militaires de la coalition anglo-américaine.

Mais le Président français avait formulé le souhait que les inspecteurs puissent continuer à accomplir leur mission conformément à la résolution 1441 du C.S.

Il a également tenu à réaffirmer l'existence des liens d'amitié qui unissent la France et les Etats-Unis. Concernant la division des pays européens au sujet de la question irakienne, J. Chirac a estimé que "l'Europe ne sera pas du tout divisée dès que la crise sera terminée"; elle "trouvera, dans ses remords de ne pas avoir pu concevoir une position unique, une force nouvelle".

Le même jour, G. Schröder s'exprimait sur l'Irak sur la chaîne d'information française LCI; à cette occasion, le chancelier allemand s'est vivement opposé au vote d'une deuxième résolution qui, à son avis, aurait légitimé la guerre: "L'Allemagne ne va pas donner son accord à une telle résolution qui légitime la guerre".

G. Schröder avait alors réaffirmé son approbation de la proposition française concernant la réunion du Conseil de sécurité au niveau des chefs d'Etats pour se prononcer sur la nécessité d'une nouvelle résolution sur l'Irak: "Si cette décision était à prendre par les chefs d'Etat et de gouvernement, cela serait une bonne chose. (...) Moi, je n'ai pas de problème pour accepter cette proposition française".

Concernant la décision au Conseil de sécurité, il avait déclaré: "Il y a une chose qui est claire: l'Allemagne sera aux côtés de la France". G. Schröder réitérait la volonté de son pays d'un désarmement pacifique de l'Irak: "Nous allons arriver à leur donner le temps dont ils ont besoin (aux inspecteurs) pour obtenir ce que tout le monde souhaite, le véritable désarmement, ceci avec des moyens pacifiques".

Dans le même sens, G. Schröder déclarait devant le Bundestag le 14 février 2003: "Nous devons avoir le courage de nous battre pour la paix tant qu'il reste une infime parcelle d'espoir qu'une guerre peut être évitée. (...) Ensemble avec nos amis Français, avec la Russie et la Chine, nous sommes plus que jamais convaincus que le désarmement de l'Irak peut et doit être obtenu par des moyens pacifiques. (...) Nous pouvons obtenir un désarmement conséquent et vérifiable grâce à une prorogation des inspections. (...) C'est pourquoi nous considérions et nous considérons encore qu'il faut insister sur la logique de paix plutôt que de passer à une logique de guerre".

Par ailleurs, G. Schröder soulignait que les dernières inspections avait démontré que Bagdad coopérait "mieux et plus activement". L'assemblée avait alors chaudement applaudi l'intervention du Chancelier allemand.


Préserver les relations de la France et de l'Allemagne avec les Etats-Unis

Rencontre des ministres des affaires étrangères anglais, américain et français: J. Straw, C. Powell et D. de Villepin le 20 janvier 2003dans la résidence de l'ambassadeur français à l'ONU - © Ministère des Affaires Etrangères / F. de la Mure
Lors d'une conférence de presse le 25 février2003, organisée après une rencontre avec le Premier ministre britannique, Tony Blair, le Ministre des affaires étrangères allemand, Joschka Fisher, déclarait à propos des relations germano-américaines: "Nous sommes des alliés proches. En ce moment les choses sont difficiles mais pas terribles, croyez-moi. (...) Pour notre gouvernement, la relation transatlantique est un pilier de la paix et de la stabilité, non seulement en Europe mais aussi dans le monde". Joschka Fisher avait également estimé que si l'Allemagne et le Royaume Uni n'étaient pas d'accord sur la question irakienne, les relations entre les deux pays restaient néanmoins "excellentes".

De son côté, lors d'une conférence de presse télévisée le 7 mars 2003, le Président américain déclarait à propos de relations de son pays avec la France et l'Allemagne: "nous avons un désaccord (...) Ils sont toujours nos amis".


Dans une interview à la télévision française le 10 mars 2003, le Président français précisait qu'en cas de conflit, la France ouvrirait - "cela va de soi" - son espace aérien aux avions militaires de la coalition anglo-américaine.











Dec 9, 2004, 11:11


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