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Quelques propositions afin d'améliorer la lutte contre la fraude au sein de l'Union européenne
Par: Prof. Dr. Bernhard FRIEDMANN* Envoyer l'article à un ami | Version imprimable
Bernhard FRIEDMANN*
* Professeur à l'Université Albert-Ludwigs de Fribourg en Brisgau - Membre de la Cour des Comptes Européenne (Président de 1996-1998)
© 2000


Plus il y aura de pays membres de l'UE, plus il sera difficile de régler les questions de détail à Bruxelles. Je pourrais m'imaginer qu'un jour le Parlement européen et le Conseil des ministres n'auront plus à décider que des grandes orientations politiques qui seront à mettre en œuvre au niveau des Etats membres. Ces pays recevront ensuite des aides financières dans le cadre d'un système de compensations. La distribution de ces compensations financières devrait être contrôlée par la Cour des comptes européenne, pour ce qui est de leur aspect technique, et par le Parlement européen et le Conseil des ministres, pour ce qui est de leur aspect politique.




Forum Franco-Allemand: La Commission européenne voudrait améliorer la lutte contre la fraude dans les institutions européennes par la création de l'OLAF (Office de la lutte anti-fraude). Pensez-vous que cet office soit suffisamment indépendant?

Bernhard Friedmann: L'OLAF dépend de la Commission, on pourrait même dire qu'il y est intégré. Les candidatures pour le poste de directeur étaient à adresser à la Commission… Forum : …qu'il est justement censé contrôler? B. Friedmann : C'est exact. Lorsqu'un organe désigne le directeur de l'instance qui est censé le contrôler, cela pose le problème de son indépendance. Le budget de l'OLAF fait partie du budget de la Commission. C'est la possibilité pour la Commission d'exercer, par ce biais, son pouvoir et quiconque veut par ailleurs traduire l'OLAF en justice, doit adresser une plainte à la Commission.

Forum : Comment pourrait-on rendre l'OLAF plus indépendant?

B. Friedmann : Le passage de l'UCLAF à l'OLAF constitue une première étape louable, mais on peut se demander si on ne devrait pas aller plus loin et si l'OLAF ne devrait pas être rattaché à la Cour des comptes.

Forum : Quel en serait l'intérêt?

B. Friedmann : Les procureurs ne peuvent enquêter que s'il existe des indices justifiant qu'une enquête soit diligentée. La Cour des comptes peut exercer un contrôle à tout moment. Par ailleurs, tous les procureurs ont besoin d'experts pour les assister. A long terme, l'objectif est de créer un parquet européen.

Forum : Un commissaire pourrait-il être amené à démissionner lorsque l'OLAF mène une instruction contre lui?

B. Friedmann : Il ne devrait en aucun cas gêner l'instruction et devrait, le cas échéant, abandonner son mandat. L'immunité d'un commissaire devrait pouvoir être rapidement levée, si le parquet l'exige et le justifie.

Forum : A peine l'élargissement aux pays de l'Est de l'Union européenne sera-t-il achevé que de nouvelles subventions devront être mises en place. Est-il encore possible de contrôler la fraude aux subventions au sein de l'Union européenne?

B. Friedmann : Oui. Mais nous devons pour cela refondre complètement les structures de l'Union européenne. Plus il y aura de pays membres de l'UE, plus il sera difficile de régler les questions de détail à Bruxelles. Je pourrais m'imaginer qu'un jour le Parlement européen et le Conseil des ministres n'auront plus à décider que des grandes orientations politiques qui seront à mettre en œuvre au niveau des Etats membres. Ces pays recevront ensuite des aides financières dans le cadre d'un système de compensations. La distribution de ces compensations financières devrait être contrôlée par la Cour des comptes européenne, pour ce qui est de leur aspect technique, et par le Parlement européen et le Conseil des ministres, pour ce qui est de leur aspect politique.

Forum : Quelles en seraient les conséquences?

B. Friedmann : La Commission prendrait alors une tout autre dimension. Elle continuerait à être au cœur des évolutions européennes mais serait déchargée des questions secondaires. Un espace économique qui est plus grand que les Etats-Unis ne peut pas être régi jusque dans les moindres détails depuis Bruxelles, par un nombre relativement limité de fonctionnaires. Nous avons besoin de mécanismes autonomes assurant la cohésion de l'Europe. Il s'agit de faire de l'Europe un espace plus souple, plus efficace et plus simple à diriger.

Forum : De cette façon, la Cour des comptes deviendrait une sorte de superinstitution. Cela n'aboutirait-il pas à un surplus de technocratie?

B. Friedmann : La Cour des comptes ne devrait pas devenir une superinstitution. Notre institution devrait travailler en plus étroite collaboration avec les différentes Cours des comptes qui continueraient d'exister dans chaque pays. D'ailleurs, cela serait peut-être plus efficace. Je ne suis en tous cas pas un adepte du gonflement et de la multiplication des administrations.

Forum : Selon vous, comment pourrait-on financer un tel système de compensations?

B. Friedmann : Actuellement , le financement de l'Union se fait en fonction du Produit Intérieur Brut. Si l'Inde par exemple était membre de l'Union européenne, elle devrait verser les contributions les plus élevées, car un milliard de personnes produisent de toute façon plus que 80 millions d'Allemands. Il serait préférable de calculer le montant des cotisations des Etats membres sur la base du PIB par habitant et sur la base du pouvoir d'achat réel, car ce chiffre reflète le niveau de vie de chaque habitant. Ainsi, si un pays A avait un revenu par habitant deux fois supérieur à celui d'un pays B, alors le pays A devrait verser deux fois plus d'argent à l'Union et recevrait deux fois moins d'aides de la part de celle-ci.

Forum : Ce système permettrait-il de lutter plus efficacement contre la fraude?

B. Friedmann : La situation est actuellement la suivante: le fonctionnaire qui révèle dans son pays une fraude aux subventions déclenche une procédure en réparation obligatoire envers l'Union européenne de la part de l'Etat mis en cause. Il est évident que pour cette raison, ce fonctionnaire ne sera pas promu. Dans le cadre d'un système de compensations, chaque pays a cependant intérêt à ce que l'argent soit utilisé à bon escient dans la mesure où l'affectation de cet argent ressortirait du domaine de compétence de chaque Etat.

Traduction Forum


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