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Saint-Gobain et l'euro
Au total, l'euro sera structurant, simplificateur, source d'économies et de développement. Dans un premier temps, la conduite du passage a été une responsabilité de la compagnie de Saint-Gobain elle-même. La raison principale en est que la phase initiale relevait plus d'un recensement ou d'une définition que d'un travail de mise en œuvre. Mais l'une des tâches essentielles du projet a été de faire appréhender le sujet de l'euro par les unités de gestion décentralisées afin qu'elles se l'approprient.©1998
Jean-Louis BEFFA - Président Directeur Général de
SAINT-GOBAIN


Préparer concrètement un groupe industriel multinational et ses nombreuses filiales à l'introduction de l'euro au 1er janvier 1999 n'est pas chose aisée. Dès le début 1996, le groupe Saint-Gobain, dont le chiffre d'affaires s'élève pour la seule Europe à plus de 60 milliards de F, a décidé de créer une équipe de projet chargée de prévoir et d'assurer l'introduction de l'euro. Il est apparu au groupe que la préparation anticipée à l'euro constituerait non seulement un avantage compétitif mais qu'elle était aussi, tout simplement, une nécessité compte tenu de sa complexité.

Avant même d'aborder les questions pratiques liées à la mise en œuvre de ce projet, l'équipe a dû constater que trois difficultés préliminaires compliquaient la tâche : l'absence de précédent, l'existence d'une phase transitoire longue (1999-2002) et l'incertitude politique alors perceptible sur la réalité de l'introduction de l'euro.

Au-delà de ce constat plutôt négatif, Saint-Gobain a très vite été convaincu qu'avec l'euro, l'environnement économique allait être profondément modifié :

- Les dévaluations ne pourront plus être utilisées comme facteur de rattrapage des retards de compétitivité.

- La comparabilité des coûts sera aussi un avantage indéniable. Elle constituera un facteur de productivité, puisque les différences dans ce domaine se trouvent aujourd'hui cachées du fait même qu'il est difficile et imprécis de les évaluer d'un pays à l'autre. L'euro introduira plus de transparence, donc plus de stimulation, entre les pays.

- La comparabilité des prix est un avantage de la même veine, qui induira plus de concurrence et favorisera les flux commerciaux.

- Au plan de la gestion financière, l'euro créera un marché plus vaste, à la fois pour les actions et les produits de taux. Les investisseurs ne craindront plus de passer les frontières puisque le risque de change aura disparu.

- Enfin, il est probable que l'euro sera la source de rationalisations "administratives" en incitant à une gestion plus efficace des fonctions centralisées.

Au total, l'euro sera structurant, simplificateur, source d'économies et de développement.

Dans un premier temps, la conduite du projet a été une responsabilité de la Compagnie de Saint-Gobain elle-même. La raison principale en est que la phase initiale relevait plus d'un recensement ou d'une définition que d'un travail de mise en œuvre. Mais l'une des tâches essentielles du projet a été de faire appréhender le sujet de l'euro par les unités de gestion décentralisées afin qu'elles se l'approprient. Il n'était pas concevable que l'ensemble des actions à mener soient définies, et encore moins mises en place par les techniciens du siège.

D'où l'impératif de décentralisation : le Groupe a donc mis en place, au début de l'année 1997, des structures de projet par métier et par pays. Celles-ci reproduisent l'organisation générale matricielle de Saint-Gobain. L'action de ces structures est coordonnée et suivie par la Compagnie, avec un rôle d'impulsion et de conseil plus que de direction.

Le Groupe a souhaité lancer les travaux le plus tôt possible. Il y a toujours, dans cette matière, des risques de dérapage dans les plannings de réalisation qu'il faut anticiper. Au fil des mois, on constate que la plus grande difficulté réside dans le maintien du rythme de travail. L'introduction de l'euro apparaissant assez lointaine aux hommes de terrain, la dynamique de mise en place a, bien naturellement, tendance à s'émousser. C'est d'ailleurs là que le nombre même de filiales concernées pose problème.

Sur le plan pratique, les systèmes d'information sont apparus comme déterminants dans la conduite du projet. Les aspects informatiques constituent un domaine où les synergies du groupe sont limitées, du fait de la multiplicité des logiciels et des matériels. Pour pallier cette faiblesse, la Compagnie a donc défini une méthode, utilisable par toutes les filiales, afin de les aider à aborder l'ensemble des questions informatiques liées à l'euro.

S'agissant de la date d'introduction de l'euro, le groupe a été amené à opérer une distinction entre les compte sociaux des filiales et les comptes consolidés de la société. Ces derniers seront exprimés en euro dès le 1er janvier 1999, et toute la communication financière se fera naturellement en euro. Ceci n'est pas seulement dicté par un effet d'image. La conversion des marchés d'actions en euro dès le début de la période transitoire impose en réalité cette décision. Quant aux filiales, elle sont invitées au basculement aussi tôt que possible compte tenu de leur contraintes de marché. Ce régime de liberté est toutefois contrôlé. Sauf motif impératif, tous les comptes sociaux des filiales devront être exprimés en euro une année avant la fin de la période transitoire, c'est-à-dire au 1er janvier 2001. Cette année d'anticipation garantira que, à la date de fin de période transitoire, toutes les sociétés seront prêtes.

Voilà donc un projet globalement lourd à mener. Avec le recul de près de deux ans, on prend bien la mesure des progrès réalisés et des efforts qui restent à fournir. Le Groupe sera prêt à l'échéance. Mais l'aide la plus efficace que le projet pouvait trouver, c'est bien la certitude de cette échéance : les filiales, pressées par la nécessité, se mettent donc en position d'une introduction à la date qui leur convient ainsi que dans les créneaux, légaux ou du Groupe, qui leur sont imposés. Toutes n'ont peut-être pas encore pleinement pris la mesure de l'opportunité historique que l'euro constituera, à terme, pour leur développement. Mais l'avenir le leur montrera.


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