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L'Euro et l'unification européenne
On ne doit pas chercher les causes du chômage dans la création de l'euro. Il est nécessaire de se souvenir que le chômage commence à l'époque où le niveau de l'inflation et les taux d'intérêt étaient encore plus élevés qu'aujourd'hui et où les pays géraient leur dette de manière beaucoup plus insouciante. Depuis, les Etats participants sont d'avis que la relance financée par le crédit n'était bien souvent qu'un "feu de paille" qui n'a pas apporté de solution définitive.©1998
Prof. Dr. Bernhard FRIEDMANN - Président de la Cour de Compte
Européenne (1998)


L'introduction de la monnaie unique ainsi que l'élargissement de l'Union Européenne à l'Europe de l'Est est un point culminant dans la construction européenne depuis quarante ans. Grâce à sa force unissante, l'union monétaire européenne contribue à l'accélération du progrès de l'Europe non seulement dans le domaine économique mais également politique. La monnaie et la politique monétaire sont d'une importance capitale pour l'avenir de l'Europe. C'est essentiellement en Allemagne que les réformes monétaires consécutives à la Première et Deuxième Guerres Mondiales ont été douloureuses. Au terme de la Première Guerre Mondiale, la réforme avait provoqué une radicalisation politique dans la République de Weimar. Des angoisses et des craintes générées par l'introduction de l'Euro sont donc compréhensibles au regard des expériences historiques.

Ce danger n'existe pas avec l'Euro. Les citoyens européens vont recevoir la contrepartie exacte en Euro de ce qu'ils détiennent dans leur monnaie nationale, sans qu'ils aient à subir de pertes.

Certaines personnes émettent encore des doutes quant à la stabilité de l'Euro car certains Etats-membres n'auraient pas encore réformé totalement leur économie et leurs systèmes financiers pour être à même d'entrer dans le système Euro. Ils attirent également l'attention sur les taux de chômage existant au sein de l'Union européenne.

Entre-temps, des rapports de la Commission et de l'Institut Monétaire Européen sur la convergence sont parus. Le Conseil central de la Bundesbank a également exprimé son avis. D'après ces rapports, on peut être sûr que les onze Etats participants vont adhérer à l'Union Economique et Monétaire à la date prévue du 1.1.1999 car ils remplissent les exigences du Traité de l'UE. La Cour Constitutionnelle allemande a, pour sa part, rejeté une demande contre l'introduction de l'Euro pour défaut de base légale. Seule la Grèce ne correspond pas encore aux exigences requises, mais ses rapides progrès lui permettront bientôt d'adhérer à l'UEM. Le Danemark et la Grande Bretagne ont laissé ouverte la question de leur participation. La Suède a également adopté cette position.

S'agit-il d'un feu vert pour l'Union Economique et Monétaire. Le chemin sera-t-il facile? D'un côté, les rapports actuels révèlent d'importants progrès par rapports aux critères de convergence, de l'autre, on remarque nettement la difficulté d'endiguer le chômage.

Il ne faut pas oublier que les Etats-membres ont évidemment changé leurs approches de l'économie politique et adopté un comportement plus stable. Ce fait est d'autant plus important que l'UE ne possède pas encore une instance en mesure d'assurer des politiques budgétaire, salariale, sociale et financière efficaces et homogènes.Au sein de l'UE, l'union monétaire sera le résultat de la somme des comportements des Etats participants. Les difficultés qui se présentent dans certains d'entre eux doivent être résolues collectivement. A cet égard, les progrès réalisés par rapport aux critères de convergence sont particulièrement motivants. Les taux moyens de l'inflation sont inférieurs à 2 %. Il y a quatre ans ce chiffre était multiplié par deux. Nous connaissons les conséquences néfastes d'une inflation importante. Par exemple, si on considère l'épargne, l'inflation la consomme comme une taxe spéciale ! Les taux d'intérêts à long terme ont également baissés. Actuellement, ils ne dépassent pas une moyenne de 5,5%. Il est évident que le niveau des taux d'intérêts influence les niveaux de l'investissement et de l'emploi. Le traitement des déficits budgétaires par les Etats participants révèle les efforts accomplis pour mettre en œuvre une union économique et monétaire stable. L'idée qu'un nombre si important de pays puisse respecter ces critères de convergence paraissait encore impossible il y a deux ans. Les déficits budgétaires moyens dans l'UE composaient 2,4% du PIB en 1997. On projette d'arriver à 1,6% en 1999. En 1993 le déficit budgétaire composait en moyenne plus de 6% du PIB.

Par ailleurs, l'endettement de l'Etat a baissé par rapport aux précédentes années. Mais il demeure quand même trop élevé. Dans trois Etats participants, l'endettement d'Etat est plus élevé que le résultat annuel de l'économie. Il faut trouver un remède à cette situation. Un abaissement plus important du déficit budgétaire et des taux d'intérêts devrait pouvoir constituer une solution. On doit souligner que les actions ponctuelles en matière de réduction de l'endettement ne contribuent pas à la stabilité à long terme. Cela nécessite une surveillance rigoureuse des critères de la convergence. Cela relève, à mon avis, de la compétence de la Cour des Comptes. L'Institut monétaire européen a précisé que l'effet des actions ponctuelles composait de 0,1 à 1% du PIB dans les Etats concernés en 1997 avec des niveaux différents selon les pays.

L'union monétaire va compléter le marché intérieur. Une harmonisation des impôts indirects manque encore. Je ne veux pas m'attarder aux seuls avantages qu'apportera l'union monétaire au marché intérieur. Il me semble toutefois utile de signaler que la disparition des coûts liés au change pour les entreprises est évaluée à vingt milliards d'ECU par an. Il est indéniable que le passage au nouveau système aura un coût. Mais ce dernier n'interviendra qu'une seule fois. Les échanges transfrontaliers à l'intérieur de l'UE n'entraîneront plus aucun risque lié au change ni aucune surprime. Cette situation sera favorable pour le niveau des taux d'intérêts et les investissements. Je suis persuadé que l'Euro constituera un concurrent sérieux pour le Dollar et pour le Yen. Le poids économique et commercial de la zone Euro va correspondre à celui des U.S.A. et dépassera celui du Japon. Le marché financier européen deviendra l'un des plus importants du monde. L'Euro constituera, au moins à moyen terme, une alternative attractive face au Dollar dans le commerce avec les pays voisins. Cela concerne essentiellement les pays d'Europe de l'Est ainsi que les pays du pourtour méditerranéen.

On ne doit pas chercher les causes du chômage dans la création de l'Euro. Il est nécessaire de se souvenir que le chômage commence à l'époque où le niveau de l'inflation et les taux d'intérêt étaient encore plus élevés qu'aujourd'hui et où les pays géraient leur dette de manière beaucoup plus insouciante. Depuis, les Etats participants sont d'avis que la relance financée par le crédit n'était bien souvent qu'un " feu de paille " qui n'a pas apporté de solution définitive. La perspective de résoudre les problèmes économiques par la variation des taux de change au sein l'union monétaire, c'est à dire par la dévaluation, ne sera plus possible. La stabilité des politiques relatives aux salaires et à l'emploi devient encore plus nécessaire; ainsi, tous les partenaires sociaux en sont responsables. Il est alors possible de créer de nouveaux emplois grâce à la flexibilité des salaires, de l'emploi et du temps de travail. Ces mesures seront plus bénéfiques que de nouvelles dépenses. A l'échelle européenne, il s'agira de saisir toutes les opportunités imaginables afin d'endiguer le chômage. En ce qui concerne l'attribution des fonds structurels, il faut davantage prendre en compte la politique de l'emploi. Cela concerne également le secteur agricole, notamment en raison de l'élargissement de l'UE à l'Europe de l'Est. Les subventions agricoles de l'UE doivent permettre de créer ou au moins de maintenir des emplois.

Je ne pense pas que les Etats participants abandonneront leur contrôle de la stabilité lors de leur adhésion à l'union monétaire. Il faut se souvenir que la Banque Centrale Européenne sera complètement indépendante et constituera le garant de la stabilité monétaire. Les mécanismes conventionnels de stabilisation de l'UE, y compris le pacte de stabilité et de croissance, vont maintenir une pression bénéfique. La Banque Centrale Européenne n'a pas le droit d'octroyer des crédits aux organismes territoriaux ou aux institutions officielles. La Banque Européenne d'Investissement vérifiera la politique de prêt aux pays participants qui ne respectent pas les règles de la stabilité.

Bilan: selon ma conviction, l'Euro va constituer un facteur d'unité au cœur de l'Union Européenne. Sa mise en œuvre ne se déroulera pas sans certaines difficultés. La monnaie unique est pourtant nécessaire. Elle apportera plus d'unité, de sécurité et, plus tard, plus de prospérité en Europe.

Traduction Forum


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