Les soldats
allemands et français se sont retrouvés face à face à deux reprises
au cours de ce siècle. Aujourd'hui ils sont engagés côte à côte,
pour la première fois, dans une action en faveur de la paix en ex-Yougoslavie.
On ne saurait apprécier suffisamment - y compris dans sa dimension
historique - le symbole politique de cet engagement commun pour
la stabilité en Europe et pour l'Europe.
Les militaires forment le groupement franco-allemand placé aux ordres
d'éléments de l'état-major de la brigade franco-allemande. Les unités
françaises et allemandes ainsi que l'état-major commun démontrent
les capacités militaires qu'ils ont acquises au cours de leur instruction
commune. Les structures des forces communes ne constituent pas seulement
un symbole politique mais prouvent dans le même temps leur efficacité
pratique. L'engagement visant à aider des hommes en détresse concrétise
aujourd'hui un geste visionnaire qui constituait en 1988, année
dans laquelle cette grande unité a vu le jour, un pas courageux
vers l'avenir.
La force du symbole n'est pas limitée aux relations entre les partenaires
eux-mêmes. Tout aussi significatif est le signal donné par l'engagement
commun: les militaires français et allemands démontrent en Bosnie,
de manière beaucoup plus pressante que tout appel saurait le faire,
qu'une véritable réconciliation et un partenariat authentique entre
des peuples autrefois antagonistes est possible. Dans cette région
où le chemin vers l'entente et une paix réelle est encore long,
la coopération franco-allemande donne le modèle impressionnant d'une
évolution qui a transformé l'ancien antagonisme des ennemis héréditaires
en liens d'amitié et le mariage d'intérêt en communauté de destin.
Aux yeux de la communauté internationale, le groupement franco-allemand
est le phare d'une intégration génératrice de paix dans les Balkans.
Ce phare représente également la nouvelle Europe qui se constitue,
qui développe une identité politique commune et qui est décidée
à maîtriser de nouvelles tâches avec les alliés et de nouveaux partenaires.
Voilà le bilan essentiel que l'on peut faire aujourd'hui après 35
ans de coopération franco-allemande à partir du Traité de l'Elysée.
En ce sens, le 22 janvier 1963 a marqué le début d'un processus
qui devait changer le visage de l'Europe et la pensée européenne.
* * *
Le général de Gaulle a dit une fois que la France et l'Allemagne
sont faites pour se compléter. Signé par Charles de Gaulle et Konrad
Adenauer, le Traité de l'Elysée met en pratique ce constat en créant
un partenariat vivant et les mécanismes de fonctionnement de la
coopération. Cet œuvre extraordinaire, à la fois réconciliatrice
et tournée vers l'avenir, ainsi que le protocole annexé au traité
de 1988 ont jeté les bases d'une vaste panoplie d'instruments de
coopération: consultations au sommet, réunions périodiques des ministres,
travaux en commun dans le cadre du Conseil de défense et de sécurité
et d'autres conseils, réunions régulières à presque tous les échelons
de travail. Les contacts et les jumelages entre régions et communes,
organisations et institutions, écoles et groupes sociaux sont devenus
entre-temps aussi nombreux et vivants que les relations à l'échelon
gouvernemental.
Ce réseau serré de relations dans le domaine de la coopération au
niveau de l'état et des rencontres humaines est d'une importance
décisive pour atteindre le double objectif politique prévu par le
Traité de l'Elysée: d'une part la réconciliation entre les peuples,
et d'autre part le développement d'une coopération bilatérale renforcée
afin de réaliser le projet visionnaire commun d'une Europe unie.
Aujourd'hui, personne ne pourra contester la réussite sans précédent
que représente la réconciliation entre les anciens "ennemis héréditaires".
Elle est devenue une constante irréversible de notre vie commune
dont profiteront non seulement Français et Allemands, mais aussi
l'Europe toute entière.
La coopération politique et militaire, elle aussi, a fait brillamment
ses preuves. Si Français et Allemands n'avaient donné les impulsions
essentielles, le processus d'intégration européenne en serait toujours
à ses balbutiements; sans la Brigade franco-allemande et le Corps
européen mis sur pied en 1993, les forces européennes ne seraient
restées qu'au niveau de l'abstraction. La coopération franco-allemande
sur le plan des armements et la création d'une agence commune de
l'armement ont des conséquences considérables pour le développement
d'une base européenne de l'armement.
A la différence de la réconciliation qui est désormais une réalité
de l'histoire, la coopération bilatérale est un processus dynamique
et permanent au cours duquel il ne s'agit pas seulement d'harmoniser,
sans relâche, les intérêts respectifs de la France et de l'Allemagne,
face à des défis sans cesse renouvelés, mais aussi de remplir cette
tâche en concertation avec nos partenaires européens et les alliés
nord-américains.
Le processus d'intégration européenne a atteint un stade où les
intérêts vitaux de chaque nation sont de plus en plus concernés
: union économique et monétaire, politique étrangère et de sécurité
commune, identité européenne de sécurité et de défense. Etant donné
la complexité de ces thèmes, des divergences de vue voire des malentendus,
sont inévitables. Surmonter ces difficultés chaque fois qu'elles
se présentent doit être considéré et accepté comme partie intégrante
de la tâche à accomplir en commun. Il est souvent plus difficile
pour les commentateurs et observateurs de la coopération franco-allemande
d'accepter cette évidence que pour les acteurs eux-mêmes.
Le succès de la coopération bilatérale dépend essentiellement de
deux paramètres : d'une part de la capacité des partenaires à gérer
avec franchise leurs différences de vue et d'autre part, de leur
volonté à conserver suffisamment de souplesse au niveau national
pour pouvoir trouver des compromis, et à renoncer à se lier par
des prises de position publiques insuffisamment voire pas du tout
harmonisées. C'est ainsi, qu'en fin de compte se manifeste la volonté
des partenaires à coopérer.
Si l'on considère les 35 années de coopération bilatérale basées
sur le Traité de l'Elysée, on comprendra qu'il ne sera guère possible
de faire de progrès décisifs pour réaliser une Europe unie, sans
les impulsions de la France et de l'Allemagne. Nous continuerons
à avoir besoin d'une étroite coordination entre la France et l'Allemagne,
mais nous ne négligerons pas pour autant la prise en compte à temps
d'autres partenaires. L'accroissement du besoin d'intégration politique
et économique fait que, lorsque la concertation bilatérale ne peut
progresser, nos efforts conjoints doivent être complétés par une
coopération équilibrée avec d'autres partenaires et alliés.
* * *
La vision que nous avons d'une Europe unie ne prévoit ni la création
d'un état central européen anonyme, ni celle d'un „royaume des ombres"
pour des nations ayant perdu leur identité. Nous voulons une Europe
dont l'identité et la force reposent sur la volonté consciente de
nations libres d'œuvrer en commun dans tous les domaines de la politique.
Nous voulons une Union Européenne qui soit une véritable union politique
incluant également la sécurité. Nous voulons une Europe économiquement
forte capable de relever les défis globaux avec des structures industrielles
globalement compétitives comportant une base également compétitive
d'industrie d'armement.
L'élément clé de cette politique est la stabilité, une stabilité
à laquelle participent tous en Europe, à laquelle tous sont intéressés
au même degré et qui conditionne la sécurité pour toute l'Europe.
Les menaces existentielles et unidimensionnelles du passé ont disparu
et elles ne renaîtront pas dans un avenir prévisible. De multiples
risques inédits et complexes ont pris la place de la menace militaire.
De nos jours, l'ennemi c'est l'instabilité. Les foyers de crise
des Balkans, du Caucase, du Proche Orient et de l'Afrique du Nord
comportent des risques pour tous en Europe. Les précautions qu'elle
doit prendre en matière de sécurité doivent donc être à la mesure
de ces risques. Nous devons être capables à l'avenir de désamorcer
à temps les crises, d'empêcher le développement des conflits ou
de les régler militairement, que ce soit en Europe ou en dehors
des limites de l'Alliance.
L'Europe n'est pas une île où règne la paix. Nous autres Européens
devons faire cause commune et nous donner les moyens de notre action
en vue de prévenir avec efficacité crises et conflits.
La capacité d'action de l'Europe est déterminée par la conviction
profonde qu'aucun état de l'Union Européenne n'est aujourd'hui en
mesure de se défendre seul, que la sécurité de l'Europe est indivisible,
que l'Europe doit devenir un partenaire égal en droits à l'Amérique
du Nord, que la capacité d'action des Européens sur le plan de la
politique de sécurité doit venir compléter celle de l'Alliance Atlantique,
sans vouloir toutefois la remplacer, et que la sécurité atlantique
et la sécurité européenne doivent utiliser les mêmes structures.
Le 27 mai 1997, l'Alliance Atlantique et la Fédération de Russie
ont signé à Paris l'Acte fondateur sur les relations, la coopération
et la sécurité mutuelles. Quelques semaines plus tard, les 8 et
9 juillet 1997, l'Alliance elle-même s'est préparée, au sommet de
Madrid, à relever les défis auxquels elle aura à faire face aujourd'hui
et demain. Des jalons décisifs ont ainsi été posés pour une nouvelle
structure de sécurité qui soit une véritable coopération pour l'Europe
toute entière.
Les deux sommets de Paris et de Madrid sont liés entre eux sur le
plan politique et stratégique; ils témoignent de l'approche d'ensemble
que nous avons pour gérer la stabilité et la sécurité: intégration
de nouveaux membres dans l'Alliance et coopération avec les pays
qui n'y sont pas ou pas encore admis. Les premiers parmi les nouveaux
candidats ont été invités à engager des pourparlers en vue d'adhérer
à l'Alliance. Dans le même temps, on a donné une perspective claire
aux états qui n'y accéderont pas ou pas encore. De plus, un partenariat
spécifique a fait l'objet d'une Charte entre l'OTAN et l'Ukraine.
Tout ceci permet de laisser en arrière les derniers restes de la
guerre froide et de reléguer Potsdam et Yalta dans les manuels d'histoire.
Paris et Madrid sont le point de départ d'une nouvelle époque de
l'histoire européenne et de l'ordre de sécurité du 21ème siècle.
Au centre de cet ordre de sécurité se situe la nouvelle OTAN avec
ses nouvelles missions, axée sur de nouveaux défis, déterminant
ainsi sa vision de son identité stratégique, sa structure interne
et sa forme extérieure. Naturellement, l'Alliance doit conserver
sa capacité de défense collective. En effet, la capacité à se protéger
en commun, si besoin est, reste le fondement de notre sécurité.
Cependant, la nouvelle OTAN met désormais l'accent sur des transferts
de stabilité, notamment en restant ouverte à de nouveaux états membres,
sur une coopération concrète avec les états non-membres ainsi que
sur une gestion de crise internationale en Europe et pour l'Europe.
Sécurité et stabilité en Europe et pour l'Europe - voilà une mission
qui ne saurait être accomplie qu'en commun, sous une responsabilité
commune. Par la mise en place du Conseil de partenariat euro-atlantique,
l'OTAN a donné une dimension manifestement nouvelle à la coopération
entre l'Alliance et ses partenaires. Celui-ci représente un mécanisme
souple permettant d'adapter la consultation et la coopération aux
besoins de chacun des différents partenaires. De plus, le partenariat
pour la paix sera approfondi et considérablement élargi. Au cours
des trois dernières années, ce programme est devenu une institution
de sécurité euro-atlantique autonome. Il entre maintenant dans une
nouvelle phase comportant des possibilités nouvelles de consultation
politique et permettant aux partenaires de participer activement
à son développement et aux décisions à prendre. Une plus forte régionalisation,
par exemple dans la zone de la mer Baltique, permettra à l'OTAN
de mieux tenir compte des intérêts et besoins de chacun des partenaires
et de contribuer par là à renforcer la stabilité régionale et entre
voisins.
Elargissement de l'OTAN veut dire exportation de stabilité. La seule
perspective d'adhésion a suffi à améliorer considérablement la stabilité
en Europe centrale: les structures démocratiques se sont consolidées,
des réformes sont en cours pour instaurer l'économie de marché,
les frontières sont reconnues, les droits des minorités sont garantis,
et le contrôle des forces armées par le pouvoir civil est toujours
mieux assuré. De plus, l'intégration interdit toute renationalisation
de la défense qui serait un facteur déstabilisant. Y compris pour
les Russes, la stabilité et le bien-être au centre de l'Europe doivent
être perçus comme la clé de la stabilité dans l'Europe toute entière.
Le processus d'accroissement de stabilité en Europe de l'Est doit
être rendu irréversible. La communauté de destin liant la France
et l'Allemagne s'est révélée être un modèle plein d'avenir, aussi
pour nos voisins et partenaires de l'Est. L'Allemagne a besoin d'établir
avec la Pologne une relation semblable à celle qu'elle entretient
avec la France. C'est une chance historique de voir l'avenir germano-polonais
se développer avec la pleine participation de la France. La coopération
trilatérale sous la forme du "triangle de Weimar" traduit le nouvel
esprit qui règne en Europe. Nous sommes résolus à continuer dans
cette voie et à profiter de l'expérience unique de la coopération
bilatérale militaire et politique pour réaliser l'intégration harmonieuse
de nouveaux membres. Nous avons la même large conception commune,
selon laquelle les stratégies d'élargissement de l'OTAN et de l'Union
Européenne ainsi que la coopération sur une base bilatérale ou multilatérale
se complètent et se renforcent mutuellement.
Nous autres Européens devons faire preuve de volonté politique et
de capacité d'action dans les crises et conflits qui surviennent
sur notre propre continent. Les décisions prises au sommet d'Amsterdam
ont renforcé la politique étrangère et de sécurité commune et ont
montré la bonne voie, bien que, certes, il restât beaucoup de chemin
à parcourir. En reprenant dans le Traité sur l'Union Européenne
les missions de Petersberg, nous avons introduit dans la politique
étrangère et de sécurité commune de l'Union une composante de politique
de défense. La nouvelle unité de planification de la politique et
d'alerte rapide vient augmenter l'efficacité opérationnelle de l'Union.
Grâce à la compétence du Conseil européen en matière de directives,
l'UEO peut servir d'organe d'exécution de l'Union dans la gestion
des crises internationales. L'instrument que constitue l'abstention
de vote constructive permet à la majorité de mener des actions même
si une minorité ne veut pas y participer. Si l'objectif de l'insertion
à terme de l'UEO dans l'Union Européenne - objectif partagé par
la France, l'Allemagne et d'autres partenaires - n'a pu être atteint,
de réels progrès ont été faits, par lesquels les deux organisations
continuent à se rapprocher et à s'imbriquer. Si l'on se réfère à
l'amélioration de la capacité d'action des Européens, les conclusions
du Conseil européen d'Amsterdam en matière de développement de l'Union
dans le domaine de la politique de sécurité peuvent être considérées
comme tout à fait satisfaisantes.
Nous n'avons cependant ni la volonté ni la nécessité d'agir séparément
de nos partenaires américains. L'approfondissement de l'intégration
européenne ne s'oppose pas aux nouvelles missions de l'OTAN. Au
contraire: un pilier européen renforcé consolidera également le
partenariat transatlantique, car l'Alliance a besoin d'un ancrage
tant en Amérique qu'en Europe.
La France et l'Allemagne ont une vue convergente sur le fait que
l'Alliance doit rester dans le nouveau contexte stratégique un outil
militaire efficace et qu'elle doit assurer sur la base d'un partenariat
durable avec les Etats-Unis d'Amérique le lien transatlantique et
l'identité européenne de sécurité et de défense comprenant la capacité
des Européens à agir de façon indépendante et solidaire.
Afin de pouvoir prévenir avec efficacité crises et conflits, les
Européens ont besoin d'outils adaptés. C'est donc l'UEO qui doit
développer une véritable capacité d'action. Les Européens doivent
être en mesure d'effectuer des opérations communes même si l'Amérique
ne veut pas y participer. Il faut cependant éviter toute redondance
de structure, que personne en Europe n'a les moyens de s'offrir.
Aussi avons-nous décidé à Berlin et à Bruxelles, au mois de juin
1996, de mettre des moyens et des capacités de l'Alliance à la disposition
de l'UEO pour des opérations menées sous son égide, dans l'hypothèse
où de telles actions apparaîtraient nécessaires. En 1997, alors
que la France et l'Allemagne assuraient successivement la présidence
de l'UEO, l'option supplémentaire consistant à utiliser des états-majors
nationaux ou multinationaux pour commander des opérations autonomes
de l'UEO, a pu être mise au point.
Nous avons donc réuni les conditions pour pouvoir réagir à de nombreux
enjeux possibles. Toutefois, la planification de circonstance dans
ce cadre ne doit pas détourner notre attention de la richesse d'options
et de l'efficacité plus prometteuse qu'offre la nouvelle OTAN.
A cette fin, il faut achever en temps voulu l'adaptation de la nouvelle
structure de commandement et orchestrer la coopération avec les
nouveaux états membres. Nous devons mettre de l'ordre chez nous
avant l'arrivée des nouveaux venus. La consolidation du pilier européen,
à définir à l'intérieur de l'Alliance et en accord avec tous les
autres membres, fait partie intégrante de ce processus et nous place
devant un défi particulier qui devra être relevé d'abord par les
partenaires de la coopération franco-allemande.
Une approche pragmatique de toutes ces questions, telle que nous
l'avons eue par le passé, est sûrement dans l'intérêt européen.
L'intégration réalisée dans la pratique, ayant abouti à la mise
sur pied de la Brigade franco-allemande et du Corps européen, est
la vraie voie par laquelle la coopération militaire bilatérale prend
forme de modèle. La multinationalité des forces armées, notion clé
de notre démarche, est une solution d'avenir. L'imbrication toujours
plus grande de nos grandes unités démontre notre résolution à agir
en commun. Nous servons les mêmes intérêts, sommes exposés aux mêmes
risques et partageons le même fardeau. Jouer un rôle créateur et
de responsabilité dans le cadre de l'Alliance atlantique et participer
à la nouvelle OTAN en profitant de tous les droits et en assumant
tous les devoirs, voilà des attitudes qui ne sont pas contradictoires,
mais complémentaires.
* * *
Conclu il y a désormais 35 ans, le Traité de l'Elysée a donné à
la coopération franco-allemande le rôle de noyau et de moteur de
l'intégration européenne. Plus que jamais, et surtout dans une époque
qui connaît de profonds changements, celle-ci doit faire preuve
de force d'intégration dans l'intérêt de l'Europe.
Que l'extraordinaire amitié franco-allemande possède cette force
et cette substance, est également et surtout prouvé par l'harmonisation
obtenue entre les différents concepts sur la nature et l'orientation
des forces armées nationales ainsi que sur la coopération en matière
d'armement. La France et l'Allemagne sont résolues à poursuivre
l'étroite coopération réalisée en particulier dans le domaine militaire
dont la mission commune accomplie en Bosnie en est une preuve significative.
Le temps presse pour se mettre d'accord sur une politique européenne
de l'armement. Face à l'énorme vague de concentration dans l'industrie
américaine de l'armement nous autres Européens ne pouvons rester
des partenaires intéressants et devenir réellement compétitifs qu'en
conjuguant nos efforts. Nous avons besoin de structures industrielles
européennes, organisées selon les principes de l'économie privée.
Les pays industrialisés les plus importants doivent y être associés
d'une manière appropriée. L'approche bilatérale ne saurait suffire.
Chacun doit avoir sa part juste et raisonnable dans les solutions
européennes communes. La capacité de l'Europe à tenir tête à la
concurrence et son aptitude au partenariat sont fonction des capacités
propres à chacun des états européens à coopérer. Des groupes industriels
européens privés sont les seuls à avoir à terme une chance sur les
marchés mondiaux.
L'étroite coopération bilatérale est tout aussi indispensable au
développement de la nouvelle OTAN et à l'émergence d'un pilier européen
renforcé au sein de l'Alliance. Maîtriser cette tâche est d'une
importance considérable pour l'identité européenne de sécurité et
de défense, notamment pour la consolidation d'une volonté politique
commune des Européens. C'est cette volonté qu'il nous faut maintenant,
ainsi que la détermination à agir. En effet, depuis la création
à Madrid et à Amsterdam du cadre structurel permettant à l'Europe
d'agir, le développement d'une politique étrangère de sécurité et
de défense commune n'est plus un problème institutionnel ou technique.
Le fait d'avoir donné des impulsions décisives pendant cette phase
importante, parachèvera le bilan extrêmement positif de 35 ans de
coopération bilatérale franco-allemande basée sur le Traité de l'Elysée
et créera des fondements solides pour le futur. L'unification européenne
est la grande œuvre historique de l'après-guerre. Sauvegarder et
développer les acquis, consolider et élargir les bases de ce que
nous avons en commun - voilà les tâches que nous sommes appelés
à accomplir dans les années à venir.
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