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La coopération franco-allemande et la sécurité européenne
L'Europe n'est pas une île où règne la paix. Nous autres Européens devons faire cause commune et nous donner les moyens de notre action en vue de prévenir avec efficacité crises et conflits. La capacité d'action de l'Europe est déterminée par la conviction profonde qu'aucun Etat de l'Union Européenne n'est aujourd'hui en mesure de se défendre seul, que la sécurité de l'Europe est indivisible, que l'Europe doit devenir un partenaire égal en droits à l'Amérique du Nord.©1997
Volker RÜHE - Ministre fédéral de la défense (1997)


Les soldats allemands et français se sont retrouvés face à face à deux reprises au cours de ce siècle. Aujourd'hui ils sont engagés côte à côte, pour la première fois, dans une action en faveur de la paix en ex-Yougoslavie. On ne saurait apprécier suffisamment - y compris dans sa dimension historique - le symbole politique de cet engagement commun pour la stabilité en Europe et pour l'Europe.

Les militaires forment le groupement franco-allemand placé aux ordres d'éléments de l'état-major de la brigade franco-allemande. Les unités françaises et allemandes ainsi que l'état-major commun démontrent les capacités militaires qu'ils ont acquises au cours de leur instruction commune. Les structures des forces communes ne constituent pas seulement un symbole politique mais prouvent dans le même temps leur efficacité pratique. L'engagement visant à aider des hommes en détresse concrétise aujourd'hui un geste visionnaire qui constituait en 1988, année dans laquelle cette grande unité a vu le jour, un pas courageux vers l'avenir.

La force du symbole n'est pas limitée aux relations entre les partenaires eux-mêmes. Tout aussi significatif est le signal donné par l'engagement commun: les militaires français et allemands démontrent en Bosnie, de manière beaucoup plus pressante que tout appel saurait le faire, qu'une véritable réconciliation et un partenariat authentique entre des peuples autrefois antagonistes est possible. Dans cette région où le chemin vers l'entente et une paix réelle est encore long, la coopération franco-allemande donne le modèle impressionnant d'une évolution qui a transformé l'ancien antagonisme des ennemis héréditaires en liens d'amitié et le mariage d'intérêt en communauté de destin.

Aux yeux de la communauté internationale, le groupement franco-allemand est le phare d'une intégration génératrice de paix dans les Balkans. Ce phare représente également la nouvelle Europe qui se constitue, qui développe une identité politique commune et qui est décidée à maîtriser de nouvelles tâches avec les alliés et de nouveaux partenaires.

Voilà le bilan essentiel que l'on peut faire aujourd'hui après 35 ans de coopération franco-allemande à partir du Traité de l'Elysée. En ce sens, le 22 janvier 1963 a marqué le début d'un processus qui devait changer le visage de l'Europe et la pensée européenne.

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Le général de Gaulle a dit une fois que la France et l'Allemagne sont faites pour se compléter. Signé par Charles de Gaulle et Konrad Adenauer, le Traité de l'Elysée met en pratique ce constat en créant un partenariat vivant et les mécanismes de fonctionnement de la coopération. Cet œuvre extraordinaire, à la fois réconciliatrice et tournée vers l'avenir, ainsi que le protocole annexé au traité de 1988 ont jeté les bases d'une vaste panoplie d'instruments de coopération: consultations au sommet, réunions périodiques des ministres, travaux en commun dans le cadre du Conseil de défense et de sécurité et d'autres conseils, réunions régulières à presque tous les échelons de travail. Les contacts et les jumelages entre régions et communes, organisations et institutions, écoles et groupes sociaux sont devenus entre-temps aussi nombreux et vivants que les relations à l'échelon gouvernemental.

Ce réseau serré de relations dans le domaine de la coopération au niveau de l'état et des rencontres humaines est d'une importance décisive pour atteindre le double objectif politique prévu par le Traité de l'Elysée: d'une part la réconciliation entre les peuples, et d'autre part le développement d'une coopération bilatérale renforcée afin de réaliser le projet visionnaire commun d'une Europe unie.

Aujourd'hui, personne ne pourra contester la réussite sans précédent que représente la réconciliation entre les anciens "ennemis héréditaires". Elle est devenue une constante irréversible de notre vie commune dont profiteront non seulement Français et Allemands, mais aussi l'Europe toute entière.

La coopération politique et militaire, elle aussi, a fait brillamment ses preuves. Si Français et Allemands n'avaient donné les impulsions essentielles, le processus d'intégration européenne en serait toujours à ses balbutiements; sans la Brigade franco-allemande et le Corps européen mis sur pied en 1993, les forces européennes ne seraient restées qu'au niveau de l'abstraction. La coopération franco-allemande sur le plan des armements et la création d'une agence commune de l'armement ont des conséquences considérables pour le développement d'une base européenne de l'armement.

A la différence de la réconciliation qui est désormais une réalité de l'histoire, la coopération bilatérale est un processus dynamique et permanent au cours duquel il ne s'agit pas seulement d'harmoniser, sans relâche, les intérêts respectifs de la France et de l'Allemagne, face à des défis sans cesse renouvelés, mais aussi de remplir cette tâche en concertation avec nos partenaires européens et les alliés nord-américains.

Le processus d'intégration européenne a atteint un stade où les intérêts vitaux de chaque nation sont de plus en plus concernés : union économique et monétaire, politique étrangère et de sécurité commune, identité européenne de sécurité et de défense. Etant donné la complexité de ces thèmes, des divergences de vue voire des malentendus, sont inévitables. Surmonter ces difficultés chaque fois qu'elles se présentent doit être considéré et accepté comme partie intégrante de la tâche à accomplir en commun. Il est souvent plus difficile pour les commentateurs et observateurs de la coopération franco-allemande d'accepter cette évidence que pour les acteurs eux-mêmes.

Le succès de la coopération bilatérale dépend essentiellement de deux paramètres : d'une part de la capacité des partenaires à gérer avec franchise leurs différences de vue et d'autre part, de leur volonté à conserver suffisamment de souplesse au niveau national pour pouvoir trouver des compromis, et à renoncer à se lier par des prises de position publiques insuffisamment voire pas du tout harmonisées. C'est ainsi, qu'en fin de compte se manifeste la volonté des partenaires à coopérer.

Si l'on considère les 35 années de coopération bilatérale basées sur le Traité de l'Elysée, on comprendra qu'il ne sera guère possible de faire de progrès décisifs pour réaliser une Europe unie, sans les impulsions de la France et de l'Allemagne. Nous continuerons à avoir besoin d'une étroite coordination entre la France et l'Allemagne, mais nous ne négligerons pas pour autant la prise en compte à temps d'autres partenaires. L'accroissement du besoin d'intégration politique et économique fait que, lorsque la concertation bilatérale ne peut progresser, nos efforts conjoints doivent être complétés par une coopération équilibrée avec d'autres partenaires et alliés.

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La vision que nous avons d'une Europe unie ne prévoit ni la création d'un état central européen anonyme, ni celle d'un „royaume des ombres" pour des nations ayant perdu leur identité. Nous voulons une Europe dont l'identité et la force reposent sur la volonté consciente de nations libres d'œuvrer en commun dans tous les domaines de la politique. Nous voulons une Union Européenne qui soit une véritable union politique incluant également la sécurité. Nous voulons une Europe économiquement forte capable de relever les défis globaux avec des structures industrielles globalement compétitives comportant une base également compétitive d'industrie d'armement.

L'élément clé de cette politique est la stabilité, une stabilité à laquelle participent tous en Europe, à laquelle tous sont intéressés au même degré et qui conditionne la sécurité pour toute l'Europe.

Les menaces existentielles et unidimensionnelles du passé ont disparu et elles ne renaîtront pas dans un avenir prévisible. De multiples risques inédits et complexes ont pris la place de la menace militaire. De nos jours, l'ennemi c'est l'instabilité. Les foyers de crise des Balkans, du Caucase, du Proche Orient et de l'Afrique du Nord comportent des risques pour tous en Europe. Les précautions qu'elle doit prendre en matière de sécurité doivent donc être à la mesure de ces risques. Nous devons être capables à l'avenir de désamorcer à temps les crises, d'empêcher le développement des conflits ou de les régler militairement, que ce soit en Europe ou en dehors des limites de l'Alliance.

L'Europe n'est pas une île où règne la paix. Nous autres Européens devons faire cause commune et nous donner les moyens de notre action en vue de prévenir avec efficacité crises et conflits.

La capacité d'action de l'Europe est déterminée par la conviction profonde qu'aucun état de l'Union Européenne n'est aujourd'hui en mesure de se défendre seul, que la sécurité de l'Europe est indivisible, que l'Europe doit devenir un partenaire égal en droits à l'Amérique du Nord, que la capacité d'action des Européens sur le plan de la politique de sécurité doit venir compléter celle de l'Alliance Atlantique, sans vouloir toutefois la remplacer, et que la sécurité atlantique et la sécurité européenne doivent utiliser les mêmes structures.

Le 27 mai 1997, l'Alliance Atlantique et la Fédération de Russie ont signé à Paris l'Acte fondateur sur les relations, la coopération et la sécurité mutuelles. Quelques semaines plus tard, les 8 et 9 juillet 1997, l'Alliance elle-même s'est préparée, au sommet de Madrid, à relever les défis auxquels elle aura à faire face aujourd'hui et demain. Des jalons décisifs ont ainsi été posés pour une nouvelle structure de sécurité qui soit une véritable coopération pour l'Europe toute entière.

Les deux sommets de Paris et de Madrid sont liés entre eux sur le plan politique et stratégique; ils témoignent de l'approche d'ensemble que nous avons pour gérer la stabilité et la sécurité: intégration de nouveaux membres dans l'Alliance et coopération avec les pays qui n'y sont pas ou pas encore admis. Les premiers parmi les nouveaux candidats ont été invités à engager des pourparlers en vue d'adhérer à l'Alliance. Dans le même temps, on a donné une perspective claire aux états qui n'y accéderont pas ou pas encore. De plus, un partenariat spécifique a fait l'objet d'une Charte entre l'OTAN et l'Ukraine. Tout ceci permet de laisser en arrière les derniers restes de la guerre froide et de reléguer Potsdam et Yalta dans les manuels d'histoire. Paris et Madrid sont le point de départ d'une nouvelle époque de l'histoire européenne et de l'ordre de sécurité du 21ème siècle.

Au centre de cet ordre de sécurité se situe la nouvelle OTAN avec ses nouvelles missions, axée sur de nouveaux défis, déterminant ainsi sa vision de son identité stratégique, sa structure interne et sa forme extérieure. Naturellement, l'Alliance doit conserver sa capacité de défense collective. En effet, la capacité à se protéger en commun, si besoin est, reste le fondement de notre sécurité. Cependant, la nouvelle OTAN met désormais l'accent sur des transferts de stabilité, notamment en restant ouverte à de nouveaux états membres, sur une coopération concrète avec les états non-membres ainsi que sur une gestion de crise internationale en Europe et pour l'Europe.

Sécurité et stabilité en Europe et pour l'Europe - voilà une mission qui ne saurait être accomplie qu'en commun, sous une responsabilité commune. Par la mise en place du Conseil de partenariat euro-atlantique, l'OTAN a donné une dimension manifestement nouvelle à la coopération entre l'Alliance et ses partenaires. Celui-ci représente un mécanisme souple permettant d'adapter la consultation et la coopération aux besoins de chacun des différents partenaires. De plus, le partenariat pour la paix sera approfondi et considérablement élargi. Au cours des trois dernières années, ce programme est devenu une institution de sécurité euro-atlantique autonome. Il entre maintenant dans une nouvelle phase comportant des possibilités nouvelles de consultation politique et permettant aux partenaires de participer activement à son développement et aux décisions à prendre. Une plus forte régionalisation, par exemple dans la zone de la mer Baltique, permettra à l'OTAN de mieux tenir compte des intérêts et besoins de chacun des partenaires et de contribuer par là à renforcer la stabilité régionale et entre voisins.

Elargissement de l'OTAN veut dire exportation de stabilité. La seule perspective d'adhésion a suffi à améliorer considérablement la stabilité en Europe centrale: les structures démocratiques se sont consolidées, des réformes sont en cours pour instaurer l'économie de marché, les frontières sont reconnues, les droits des minorités sont garantis, et le contrôle des forces armées par le pouvoir civil est toujours mieux assuré. De plus, l'intégration interdit toute renationalisation de la défense qui serait un facteur déstabilisant. Y compris pour les Russes, la stabilité et le bien-être au centre de l'Europe doivent être perçus comme la clé de la stabilité dans l'Europe toute entière.

Le processus d'accroissement de stabilité en Europe de l'Est doit être rendu irréversible. La communauté de destin liant la France et l'Allemagne s'est révélée être un modèle plein d'avenir, aussi pour nos voisins et partenaires de l'Est. L'Allemagne a besoin d'établir avec la Pologne une relation semblable à celle qu'elle entretient avec la France. C'est une chance historique de voir l'avenir germano-polonais se développer avec la pleine participation de la France. La coopération trilatérale sous la forme du "triangle de Weimar" traduit le nouvel esprit qui règne en Europe. Nous sommes résolus à continuer dans cette voie et à profiter de l'expérience unique de la coopération bilatérale militaire et politique pour réaliser l'intégration harmonieuse de nouveaux membres. Nous avons la même large conception commune, selon laquelle les stratégies d'élargissement de l'OTAN et de l'Union Européenne ainsi que la coopération sur une base bilatérale ou multilatérale se complètent et se renforcent mutuellement.

Nous autres Européens devons faire preuve de volonté politique et de capacité d'action dans les crises et conflits qui surviennent sur notre propre continent. Les décisions prises au sommet d'Amsterdam ont renforcé la politique étrangère et de sécurité commune et ont montré la bonne voie, bien que, certes, il restât beaucoup de chemin à parcourir. En reprenant dans le Traité sur l'Union Européenne les missions de Petersberg, nous avons introduit dans la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union une composante de politique de défense. La nouvelle unité de planification de la politique et d'alerte rapide vient augmenter l'efficacité opérationnelle de l'Union. Grâce à la compétence du Conseil européen en matière de directives, l'UEO peut servir d'organe d'exécution de l'Union dans la gestion des crises internationales. L'instrument que constitue l'abstention de vote constructive permet à la majorité de mener des actions même si une minorité ne veut pas y participer. Si l'objectif de l'insertion à terme de l'UEO dans l'Union Européenne - objectif partagé par la France, l'Allemagne et d'autres partenaires - n'a pu être atteint, de réels progrès ont été faits, par lesquels les deux organisations continuent à se rapprocher et à s'imbriquer. Si l'on se réfère à l'amélioration de la capacité d'action des Européens, les conclusions du Conseil européen d'Amsterdam en matière de développement de l'Union dans le domaine de la politique de sécurité peuvent être considérées comme tout à fait satisfaisantes.

Nous n'avons cependant ni la volonté ni la nécessité d'agir séparément de nos partenaires américains. L'approfondissement de l'intégration européenne ne s'oppose pas aux nouvelles missions de l'OTAN. Au contraire: un pilier européen renforcé consolidera également le partenariat transatlantique, car l'Alliance a besoin d'un ancrage tant en Amérique qu'en Europe.

La France et l'Allemagne ont une vue convergente sur le fait que l'Alliance doit rester dans le nouveau contexte stratégique un outil militaire efficace et qu'elle doit assurer sur la base d'un partenariat durable avec les Etats-Unis d'Amérique le lien transatlantique et l'identité européenne de sécurité et de défense comprenant la capacité des Européens à agir de façon indépendante et solidaire.

Afin de pouvoir prévenir avec efficacité crises et conflits, les Européens ont besoin d'outils adaptés. C'est donc l'UEO qui doit développer une véritable capacité d'action. Les Européens doivent être en mesure d'effectuer des opérations communes même si l'Amérique ne veut pas y participer. Il faut cependant éviter toute redondance de structure, que personne en Europe n'a les moyens de s'offrir. Aussi avons-nous décidé à Berlin et à Bruxelles, au mois de juin 1996, de mettre des moyens et des capacités de l'Alliance à la disposition de l'UEO pour des opérations menées sous son égide, dans l'hypothèse où de telles actions apparaîtraient nécessaires. En 1997, alors que la France et l'Allemagne assuraient successivement la présidence de l'UEO, l'option supplémentaire consistant à utiliser des états-majors nationaux ou multinationaux pour commander des opérations autonomes de l'UEO, a pu être mise au point.

Nous avons donc réuni les conditions pour pouvoir réagir à de nombreux enjeux possibles. Toutefois, la planification de circonstance dans ce cadre ne doit pas détourner notre attention de la richesse d'options et de l'efficacité plus prometteuse qu'offre la nouvelle OTAN.

A cette fin, il faut achever en temps voulu l'adaptation de la nouvelle structure de commandement et orchestrer la coopération avec les nouveaux états membres. Nous devons mettre de l'ordre chez nous avant l'arrivée des nouveaux venus. La consolidation du pilier européen, à définir à l'intérieur de l'Alliance et en accord avec tous les autres membres, fait partie intégrante de ce processus et nous place devant un défi particulier qui devra être relevé d'abord par les partenaires de la coopération franco-allemande.

Une approche pragmatique de toutes ces questions, telle que nous l'avons eue par le passé, est sûrement dans l'intérêt européen. L'intégration réalisée dans la pratique, ayant abouti à la mise sur pied de la Brigade franco-allemande et du Corps européen, est la vraie voie par laquelle la coopération militaire bilatérale prend forme de modèle. La multinationalité des forces armées, notion clé de notre démarche, est une solution d'avenir. L'imbrication toujours plus grande de nos grandes unités démontre notre résolution à agir en commun. Nous servons les mêmes intérêts, sommes exposés aux mêmes risques et partageons le même fardeau. Jouer un rôle créateur et de responsabilité dans le cadre de l'Alliance atlantique et participer à la nouvelle OTAN en profitant de tous les droits et en assumant tous les devoirs, voilà des attitudes qui ne sont pas contradictoires, mais complémentaires.

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Conclu il y a désormais 35 ans, le Traité de l'Elysée a donné à la coopération franco-allemande le rôle de noyau et de moteur de l'intégration européenne. Plus que jamais, et surtout dans une époque qui connaît de profonds changements, celle-ci doit faire preuve de force d'intégration dans l'intérêt de l'Europe.

Que l'extraordinaire amitié franco-allemande possède cette force et cette substance, est également et surtout prouvé par l'harmonisation obtenue entre les différents concepts sur la nature et l'orientation des forces armées nationales ainsi que sur la coopération en matière d'armement. La France et l'Allemagne sont résolues à poursuivre l'étroite coopération réalisée en particulier dans le domaine militaire dont la mission commune accomplie en Bosnie en est une preuve significative.

Le temps presse pour se mettre d'accord sur une politique européenne de l'armement. Face à l'énorme vague de concentration dans l'industrie américaine de l'armement nous autres Européens ne pouvons rester des partenaires intéressants et devenir réellement compétitifs qu'en conjuguant nos efforts. Nous avons besoin de structures industrielles européennes, organisées selon les principes de l'économie privée. Les pays industrialisés les plus importants doivent y être associés d'une manière appropriée. L'approche bilatérale ne saurait suffire. Chacun doit avoir sa part juste et raisonnable dans les solutions européennes communes. La capacité de l'Europe à tenir tête à la concurrence et son aptitude au partenariat sont fonction des capacités propres à chacun des états européens à coopérer. Des groupes industriels européens privés sont les seuls à avoir à terme une chance sur les marchés mondiaux.

L'étroite coopération bilatérale est tout aussi indispensable au développement de la nouvelle OTAN et à l'émergence d'un pilier européen renforcé au sein de l'Alliance. Maîtriser cette tâche est d'une importance considérable pour l'identité européenne de sécurité et de défense, notamment pour la consolidation d'une volonté politique commune des Européens. C'est cette volonté qu'il nous faut maintenant, ainsi que la détermination à agir. En effet, depuis la création à Madrid et à Amsterdam du cadre structurel permettant à l'Europe d'agir, le développement d'une politique étrangère de sécurité et de défense commune n'est plus un problème institutionnel ou technique.

Le fait d'avoir donné des impulsions décisives pendant cette phase importante, parachèvera le bilan extrêmement positif de 35 ans de coopération bilatérale franco-allemande basée sur le Traité de l'Elysée et créera des fondements solides pour le futur. L'unification européenne est la grande œuvre historique de l'après-guerre. Sauvegarder et développer les acquis, consolider et élargir les bases de ce que nous avons en commun - voilà les tâches que nous sommes appelés à accomplir dans les années à venir.


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