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AUTRES TEXTES FRANCO-ALL. ET EUROPEENS
Propositions conjointes franco-allemandes sur la gouvernance économique - 22/12/02
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Nov 22, 2003, 20:04




Le Secrétaire général de la Convention a reçu, de M. Dominique de Villepin et de M. Joschka Fischer, la contribution sur la Gouvernance économique.

L'existence de l'euro, l'expérience de la coordination des politiques économiques depuis 1997 et l'arrivée de nouveaux membres dans l'Union européenne imposent de renforcer la gouvernance économique de l'Europe, notamment dans la zone euro.

Le Traité actuel reflète le choix d'un partage de compétences équilibré :

* la politique monétaire dans la zone euro est une compétence communautaire, détenue par la Banque Centrale Européenne (BCE) ;
* le politique budgétaire est de la responsabilité des Etats membres, à charge pour eux de respecter la règle commune (article 104 du Traité relatif aux déficits excessifs) et de coordonner leurs politiques économiques dans le cadre du Conseil ECOFIN (article 99 du Traité) ;
* la Commission ne dispose d'aucun pouvoir exécutif, mais elle exerce un rôle, partagé avec le Conseil, de surveillance multilatérale des politiques économiques des Etats membres. Le Conseil dispose en effet du pouvoir de décision pour les recommandations (art. 99-4, 104-6) et les sanctions (art. 104-11) adressées aux Etats membres ;
* l'Eurogroupe, mis en place par le Conseil européen en 1997, est le forum pour la coordination préalable et informelle dans la zone euro, mais seul le Conseil ECOFIN est habilité à prendre des décisions formelles.


Tout en préservant ce partage efficace de compétences prévu dans le Traité, la France et l'Allemagne souhaitent parvenir à une coordination plus étroite des politiques économiques dans l'Union européenne, et particulièrement dans la zone euro, de façon à promouvoir la croissance économique en Europe et à renforcer le poids de l'Europe. Afin de réaliser ces objectifs, la gouvernance économique pourrait être renforcée par les moyens suivants :

* un cadre approprié respectant le partage actuel des compétences ainsi que des procédures efficaces, afin de permettre une prise de décisions rapide, crédible et adéquate pour la zone euro;
* la reconnaissance d'intérêts particuliers pour les Etats Membres appartenant à la zone euro, justifiant une coopération plus poussée.


Dans ce contexte, la France et l'Allemagne aimeraient exprimer leurs propositions conjointes sur quatre sujets importants, qui ont été mis en lumière dans le rapport du groupe de travail de la Convention sur la gouvernance économique, ainsi que pendant les discussions en session plénière:


1) RENFORCER LA COHESION DE LA ZONE EURO EN CONFORTANT L'EUROGROUPE ET EN DOTANT LA ZONE EURO D'UNE CAPACITE DECISIONNELLE

La France et l'Allemagne sont favorables à un renforcement de la coordination économique à l'intérieur de la zone euro. L'efficacité de la coordination des politiques économiques revêt la plus haute importance pour les pays appartenant à la zone euro parce qu'ils partagent une politique commune en matière de taux d'intérêts. Ceci suppose de débattre régulièrement de ces questions et d'assurer une bonne coordination des politiques communes avec les politiques fiscales et budgétaires qui restent largement nationales. Une convergence plus forte est nécessaire pour parvenir à une plus grande intégration économique et à un policy mix vraiment efficace. Dans cette optique, la France et l'Allemagne formulent trois propositions pour la zone euro :

1. reconnaître l'existence de l'Eurogroupe, dans un protocole annexé au Traité, pour préserver son rôle essentiel de pilote de la zone euro, tout en s'assurant qu'il reste une enceinte de dialogue informel avec la BCE.
2. élire son président pour un mandat de deux ans de manière à renforcer la présidence de l'Eurogroupe et à améliorer sa visibilité.
3. de plus, parce qu'un grand nombre d'Etats Membres ne seront pas membres de la zone euro pendant plusieurs d'années, la France et l'Allemagne soulignent la nécessité pour les Etats Membres de la zone euro de décider entre eux, dans le cadre du Conseil, de toutes questions liées à l'existence de leur monnaie commune (par exemple, les programmes de stabilité, la partie des Grandes Orientations de Politiques Economiques (GOPE) concernant la zone euro). Cela pourrait prendre la forme d'un Conseil Euro-ECOFIN comme cela a été proposé par la Commission.


2) AMELIORER LA COORDINATION DES POLITIQUES ECONOMIQUES

L'amélioration de la coordination des politiques économiques est souhaitable dans la mesure où cela ne bouleverse pas l'équilibre du triangle institutionnel existant (Commission Conseil Parlement européen) qui a fait preuve de son efficacité.

La France et l'Allemagne proposent :

1. le renforcement de l'instrument central de coordination des politiques, c'est-à-dire les GOPE, en mettant davantage l'accent sur leur mise en œuvre et en encourageant une implication plus marquée des parlements nationaux et
2. le renforcement des procédures de surveillance budgétaire : une distinction claire devrait être faite, d'une part entre les procédures liées aux pouvoirs de surveillance objective (procédure d'alerte précoce quand il y a un risque de dépassement du seuil des 3 %) qui doivent être accordés à la Commission et, d'autre part, le rôle de recommandation dans le domaine de la politique économique, que doit garder le Conseil. La Commission devrait avoir le droit de procéder à une évaluation de la situation, indépendamment du Conseil, quand il y a un risque de dépassement du seuil des 3 %. Cette évaluation devrait s'effectuer en commun avec les Etats Membres, dans le cadre d'une procédure contradictoire et elle devrait être fondée sur une analyse globale et exhaustive. De plus, cela implique que la Commission améliore la qualité et l'efficacité de la surveillance.


Les responsabilités de la Commission concernant les GOPE et la procédure de déficits publics excessifs devraient être maintenues en l'état.

3) PARACHEVER LE MARCHE INTERIEUR EN REALISANT UNE VERITABLE CONVERGENCE FISCALE

Dans le domaine fiscal, le maintien d'un système de prise de décision à l'unanimité serait un sérieux obstacle à toute avancée. Dans ce contexte, la France et l'Allemagne réitèrent la position commune présentée en 2000 lors du Conseil Européen de Nice en faveur d'un plus large recours au vote à la majorité qualifiée pour les questions fiscales directement liées au marché intérieur, comme : l'élimination des obstacles directs à la libre circulation des biens, des personnes, des services ou des capitaux et, en particulier, la prévention de situations de discrimination, de double imposition ou de double exonération ; certaines dispositions portant sur l'harmonisation des taxes sur les chiffres d'affaires et des droits d'accises et la coopération entre les autorités fiscales ; la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale ; l'élimination de la concurrence fiscale dommageable. Il paraît nécessaire de parachever le marché intérieur, c'est-à-dire de limiter les divergences d'imposition existantes dans les Etats Membres et d'éliminer les régimes fiscaux dommageables. Par ailleurs, l'approche à moyen terme la plus pragmatique et la plus efficace à privilégier pour la création d'une Europe unifiée est de fixer un objectif de convergence concentrant les efforts sur quelques questions fiscales clés.

4) PROGRESSER VERS UNE CHAISE UNIQUE POUR LA REPRESENTATION EXTERNE

En ce qui concerne la représentation externe de la zone euro, la France et l'Allemagne estiment que la chaise unique permettra à l'Europe intégrée d'être représentée de façon adéquate dans les institutions financières internationales telles que le FMI. Une chaise unique européenne donnera à l'Union Européenne le moyen de peser face à d'autres acteurs majeurs dans le monde. Une première étape exige le renforcement et l'approfondissement du travail de préparation des positions communes dans les institutions financières internationales.

Joschka Fischer

Dominique de Villepin




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